Que les fans de pop punk se réjouissent de ces événements qui, par habitude, se déroulent dans des contrées lointaines où la langue plébiscitée est l’anglais : ce samedi soir, la France est au point avec un plateau inattendu proposé par Alternative Live. Prenez pour plat principal un All Time Low qui nous avait laissé un mauvais souvenir de son dernier Bataclan (mais qui s’était fait pardonné en 2014 avec un Cabaret Sauvage mémorable); ajoutez à cela deux formations montantes du pop punk signées dans deux labels indépendants distincts, à savoir Fearless Records et Hopeless Records, et le tour est joué pour obtenir une soirée sold out de fond en comble. Il s’avérera même compliqué pour les personnes qui ne croyaient pas à cette date complète d’obtenir le fameux sésame en dehors de la salle… Qui l’aurait cru ?
Après une difficile entrée dans la salle (la longueur de la queue, les tickets early-entry ainsi que l’attente dans le froid y sont pour quelque chose), c’est face à la moitié du Bataclan que REAL FRIENDS commence son set. L’autre partie étant dehors en train de passer la sécurité, rien n’empêche la bande originaire de Tinley Park de venir exercer les titres de son premier album “Maybe This Place Is The Same And We’re Just Changing”, fraîchement sorti l’année passée. Tels qu’affichés sur le CD, “Maybe This Place Is The Same” et “I Don’t Love You Anymore” raisonnent dans l’enceinte de la salle, confrontés à un public connaisseur. Dan Lambton y lâche par dessus son chant émo reconnaissable et téméraire, contant, avec connaissance, chaque parole qu’il a écrit dans le passé. “Personne ne nous connait, mais nous allons jouer une de nos anciennes chansons” s’amusent à lancer les musiciens avant d’entamer “Floodboards”. Celle-ci réveillera d’ailleurs la fosse au point de voir les premiers pogos de ce samedi soir se préparer. Très vite limité par la durée réduite du set, le quintette finit par faire sa petite promotion non sans humour (“Vous pouvez acheter notre dernier disque à notre merch ou écrire son nom sur Google et le télécharger”) ainsi qu’un discours sur la liberté d’expression, en hommage aux attentats de Charlie Hebdo. “Late Nights In My Car” clôture les trente minutes sur scène du groupe, sous d’admirables applaudissements, preuve de contentement.
Très attendu en France après un premier full-length, NECK DEEP ne tarde pas à se ramener sur l’estrade. Non officiellement au complet puisque l’un des guitaristes est récemment devenu papa, ce sera finalement 4/5ème du groupe et le guitariste de Climates qui viendront faire la connaissance du public français. D’humeur, les Gallois se lancent directement avec “Losing Teeth”, l’un des derniers singles sortis. Sur place pour présenter “Wishful Thinking“, mais également pour préparer le terrain avant la sortie prochaine de leur second essai, ND n’hésite cependant pas une seconde à faire un bon dans le passé, sous la forme de “Tables Turned”, issu de son second EP “A History Of Bad Decisions” (2013). La fosse, très excitée et loin d’être assagie, divague et s’adonne aux pogos au rythme de la batterie. Les épaules relevées, Ben Barlow s’éclate, chante et même parfois crie, essoufflé par tous ses aller–retour sur scène. Vitesse et distorsion de rigueur, le set pop punk semble parfaitement rodé et contrôlé, variant entre les époques et les envies. “A Part Of Me” trouvera même sa place dans la soirée, face à un Bataclan chantant à tue-tête. Le seul bémol que l’on retrouve à dire sur la performance des musiciens, ce sont les facilités vocales auxquelles fait preuve le chanteur, qui esquive toutes les notes aiguës. Et oui, nous, on l’aime la montée finale de “Zoltar Speaks” qui n’a pas eu lieu.
Changement radical de plateau, bâche tirée avec soin, petites estrades installées de part et d’autre du micro central. Une mise en place carrée qui s’impose pour le headliner de ce samedi soir. Car bien que les deux premiers groupes étaient une grande source d’intérêt pour les personnes présentes, il ne faut pas laisser de côté les Américains. Sur le gong de 21h, ALL TIME LOW se laisse aller par l’ambiance et commence sur les chapeaux de roues. “Lost In Stereo” ouvre le bal de ce qui sera la dernière performance pop punk de la soirée. Sur une touche bien plus soft que les formations précédentes, le quintette (si l’on compte le musicien live) s’exalte de sa présence et n’a plus rien à se faire pardonner (dixit, la dernière fois). “Stella”, du même album “Nothing Personal” (2009), est pris en main par les fans qui, nombreux, reprennent le refrain en choeur. Le chanteur Alex n’est bel et bien pas malade cette fois-ci et enchaîne avec ses compagnons une cascade de singles : “A Love Like War” minus Vic Fuentes, “Damned If I Do Ya (Damned If I Don’t)” ou encore “Weightless”. Autant dire la soupe habituelle qui s’apprécie et qui engendre un jet classique de soutiens-gorges. La formation, comblée par cette touche d’affection française, en revient toujours à ironiser sur le dernier Bataclan catastrophique. Puis, l’opus le moins plébiscité par le public, à savoir “Dirty Work” (2011), arrive également à l’honneur avec “Heroes”, un morceau qui n’est pas d’actualité dans les sets habituels des rockeurs. Le temps des distorsions laisse rapidement place au moment émotion avec Gaskarth seul sur scène avec “Remembering Sunday” et “Therapy”. Ce moment sera assez dur à digérer suite à une coupure un brun trop brutale. Les moments calmes sont primordiaux pour un concert correct, mais jamais après une courte demi-heure de performance. Ceci dit, cette pause permettra aux Américains de revenir en force avec une version live de “Kids In The Dark”, rodé mais sans plus. Par la suite, tel un combo à succès, ATL continuera son show, suivant le chemin de ses chansons phares, avec “Backseat Serenade”, “Time-Bomb” sur laquelle une partie de l’audience monte sur scène et “Something’s Gotta Give”. Une des dernières surprises que nous réservent les musiciens reste la courte reprise de “American Idiot” de Green Day, avant de clôturer le tout par “Dear Maria, Count Me In”.
A posteriori, trois concerts en cohérence et en communion. Même si les termes “pop punk” et “All Time Low” paraissent de plus en plus lointains et éloignés, la nouvelle génération, représentée par The Story So Far, The Wonder Years ou encore Neck Deep, assume déjà la relève du genre. Les Américains, à force de sortir des albums, ne finissent plus qu’à jouer leurs singles en concert mais cela, on ne peut malheureusement pas leur en vouloir !
Setlist :
Lost in Stereo
Stella
Heroes
A Love Like War
Damned If I Do Ya (Damned If I Don’t)
The Irony Of Choking On A Lifesaver
Weightless
Remembering Sunday
Therapy
Kids In The Dark
Backseat Serenade
Time-Bomb
Something’s Gotta Give
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The Reckless And The Brave
American Idiot
Dear Maria, Count Me In