Après un baptême parisien à Rock En Seine en août dernier, Amber Run donnait son tout premier concert en tête d’affiche à La Maroquinerie. Entre puissance et fragilité, le groupe de Nottingham est venu ravir un public conquis d’avance.
Alors que la salle est encore très clairsemée, les Anglais de FLYTE ouvrent en douceur la soirée. La jeune formation londonienne offre une pop indé toute en mélodies délicates et légères, s’autorisant parfois quelques digressions psychédéliques. Mais la force du groupe réside surtout dans son utilisation maîtrisée des harmonies. Les voix des trois musiciens se mêlent avec grâce à celle du chanteur Will Taylor, en témoigne leur reprise a cappella de “Archie, Marry Me” du groupe Alvvays. Que ce soit sur la douce rêverie poétique de “Faithless” ou sur la plus dansante “Cathy Come Home”, le quatuor use sans en abuser d’harmonies et de claviers rétros pour dessiner un univers lumineux faussement candide. Difficile de ne pas avoir les Beatles dans un coin de la tête en entendant la musique de Flyte, mais la fraîcheur et la sincérité du groupe lui confère une modernité qui donne envie d’aller découvrir sur le champ son premier album, “The Loved Ones”, publié en août.
La salle est seulement honorablement remplie, mais l’excitation palpable avant le début du show se transforme en vague d’amour et d’enthousiasme à peine les cinq musiciens d’AMBER RUN grimpés sur scène. En ouvrant avec les lumineux “Pilot”, puis “Spark”, la bande semble décidée à éclairer cette morose soirée d’octobre. Appliqué et en retenue au premier abord, le groupe se décrispe rapidement face à un public ultra réceptif. Sautillant joyeusement sur les tumultueuses “Just My Soul Responding” et “Noah” ou chantant en choeur sur la plus douce “Fickle Game”, la foule, assez hétéroclite, suit la formation dans toutes ses humeurs. Car si Amber Run est principalement connu pour ses ballades déchirantes, il démontre ce soir la richesse de son répertoire. Mystérieux et envoûtant sur “Stranger”, le groupe plonge dans les ténèbres sur l’explosive “Dark Bloom”, avant d’ouvrir grand les fenêtres et de laisser entrer le soleil sur “Good Morning”, tube feel-good en puissance.
Amber Run mêle à ses mélodies gonflées d’espoir les sonorités plus rock de son second album, “For A Moment I Was Lost” (2017), à l’image de “Island” et son final instrumental retentissant, qui vaudra au groupe une longue ovation. Face au public ne semblant jamais vouloir s’arrêter d’applaudir, le chanteur Joe Keogh se fend d’un grand sourire et fait durer le moment, avant de calmer les ardeurs en annonçant ensuite un morceau calme et triste. Retour aux sources avec l’épurée “5AM”, extraite du premier album. Mais le moment émotion de fin de set arrive avec “Wastelands” et son envolée explosive en fin de morceau, caractéristique d’Amber Run. Après avoir rappelé à quel point jouer à Paris semblait un lointain rêve pour lui, le quatuor quitte la scène sur l’avalanche d’harmonies lumineuses de “Heaven”.
“On a encore quelques morceaux à jouer, on vous a menti, comme font tous les bons groupes indé !”, plaisante Joe Keogh en remontant sur scène après un rapide passage en coulisses. Multipliant remerciements (“Je tiens à vous remercier en personne un à un à la fin du concert”) et sourires touchés, le leader décide de faire bon usage de l’enthousiasme de l’audience en la laissant chanter l’incontournable “I Found” tout seul. L’assemblée s’époumone de bon coeur, avant d’être accompagnée par la voix impeccable du frontman. Principal point fort du groupe, sa voix impressionne pendant tout le set par sa puissance mais “No Answers” lui donne encore une autre dimension. Habituellement claire et posée, elle devient rauque et déchirante tandis qu’autour de lui, ses bandmates grattent et frappent frénétiquement. Aussi douce que tempétueuse, synthèse parfaite de la musique d’Amber Run, la chanson clôt gracieusement un premier concert auréolé de succès.
Peu de groupes peuvent se targuer de recevoir un accueil aussi chaleureux pour leur premier concert que celui qu’avait préparé La Maroquinerie pour Amber Run. En équilibrant avec brio les différents tempéraments de ses deux albums, la formation jongle avec aisance entre l’ombre et la lumière et rend ses morceaux beaucoup plus percutants en live. Seule ombre au tableau, la durée du set, beaucoup trop bref. Jouer 1h10 quand sa discographie compte seulement un album, c’est moyen, mais quand elle en compte deux, c’est presque impardonnable.
Setlist :
Pilot
Spark
Insomniac
Stranger
Fickle Game
Just My Soul Responding
Dark Bloom
Good Morning
Island
5AM
Noah
Wastelands
Heaven
—-
Haze
I Found
No Answers