Après une absence de près de quatre ans dans l’Hexagone, Bastille a choisi la Salle Pleyel pour faire son grand retour dans la capitale. L’occasion de balayer cette météo maussade mais surtout de présenter le très réussi Give Me The Future, sorti plus tôt dans l’année.
Classique de chez classique
Si l’Angleterre a inventé le rock, le pays a également engendré son lot de groupes qui se contentent de l’incarner vaguement sans vraiment le révolutionner. Malheureusement pour eux, les cinq gars de THE NATIVE font partie de cette catégorie. Les Britanniques officient dans un rock convenu et formaté, porté par un chanteur à la voix mélancolique et une disto qui n’existe que sur les refrains. Sur un titre, des nappes de synthé insufflent une vibe rétro qui donne plus de consistance à leur musique. Mais l’espoir est de courte durée. Les titres se suivent, se ressemblent et le constat est sans appel : le set s’essouffle. Il faut dire que la présence scénique quasi inexistante des Anglais n’aide pas. Sur le final “Time”, The Native se lâche enfin physiquement et ose de vraies mélodies à la guitare. Sans mauvais jeu de mot, il était temps !
Divertissant… dès l’entracte !
Qui a dit que l’entracte était un moment ennuyant ? Avant même de jouer, BASTILLE propose une occupation plutôt philanthropique. Derrière la scène, l’écran diffuse un QR code accompagné d’un appel au don pour l’association War Child qui vient en aide aux enfants victimes de la guerre. Un peu plus bas, cela s’active avec la mise en place d’une scène sur trois niveaux et d’un mystérieux divan au centre. Nul doute que l’imagination débordante de Dan Smith est encore passée par là. C’est pour cette raison que chaque concert de Bastille est un événement en soi. Les Anglais arrivent toujours à surprendre leur public avec des scénographies léchées.
La société Future Inc.
Peu après 21h, une vidéo se lance sur les écrans. L’entreprise factice Future Inc., créée comme fil conducteur du nouvel album, diffuse un clip dont les images questionnent sur l’espèce humaine et son dangereux penchant pour l’innovation. Après un début de set en grande pompe sur “Stay Awake?”, Dan s’allonge sur le divan et bénéficie de l’expérience Future Inc. Les “Don’t wake me up” de “Distorted Light Beam” n’auront jamais été aussi annonciateurs. Est-ce Bastille ou l’entreprise qui s’occupe de nous divertir ce soir ? La réponse importe peu car le résultat se tient là, face à nous. Les Britanniques, encore en début de tournée, sont en grande forme et enchaînent des titres parfois revisités pour le live.
Un air d’anniversaire
Bastille possède quelque chose de précieux que n’a pas la société Future Inc. Un passé et une discographie qui commence à s’étoffer. Il y a déjà dix ans, le chanteur Dan Smith sortait seul, Bad Blood (2013), le premier album officiel de Bastille. Si la moitié du set est évidemment consacré au nouveau disque, une autre partie est dédié à cet album. Quelle joie d’entendre le chanteur nous gratifier de ses plus beaux aigus sur “Oblivion”, de rappeler ses influences cinématographiques sur “Laura Palmer” ou encore de faire lever la foule entière sur l’inattendue “Of The Night”. Parfois hyperactif, souvent blagueur, sans surprise, Dan Smith attire tous les regards. Et pourtant, Bastille a bien d’autres arguments dans sa besace pour faire vibrer son public.
Un groupe, des influences
Cela n’aura échappé à personne, le quintette devient ce soir un sextuor. La chanteuse Bim Amoako accompagne Bastille sur l’ensemble de la tournée. Et celle qui a dirigé la chorale gospel du mariage du Prince Harry a de la voix ! Si sur album “Surviving” et “Give Me The Future” font d’aimables clins d’œil au gospel, ces titres rendent un hommage vibrant et festif au genre. Mais les influences du groupe ne s’arrêtent pas là. Quand la basse vrombissante de “Back To The Future” sert du côté de la funk, les guitares abrasives de “WHAT YOU GONNA DO ???” mettent les deux pieds dans le rock, pour le plus grand bonheur de tous. Le karaoké improvisé sur la rnb “Plug In” et la traversée de la fosse par Dan sur “Happier” sont autant de moments forts que de preuves tangibles de l’incroyable maturité de Bastille.
Dernier plongeon
Après un “Pompeii” d’anthologie qui a levé et fait chanter les foules, les Anglais se retirent. Une vidéo s’en suit et l’expérience Future Inc. prend fin. Ce qui veut dire… le retour de Bastille sur scène ! Dan Smith remercie la salle et le public avant de l’inviter à s’époumoner une ultime fois sur “Shut Off The Lights”, dont les paroles du refrain sont relayées sur l’écran. Si Bastille nous avait régalé avec Give Me The Future, les Anglais ont plus que transformé l’essai ce soir. Une heure quarante durant, Bastille a su tirer le fil de son concept album pour nous parler de sujets modernes, sombres et complexes… dans la joie et la bonne humeur. À moins que ce ne soit encore un coup de Future Inc. Allez savoir si ce n’est pas eux qui ont rédigé ce live report.