Only Talent Productions se débrouille toujours pour nous dégoter des concerts aux petits oignons, et réitérera avec le show de ce soir présentant cinq groupes, tout aussi talentueux les uns que les autres, pour une date unique en France. Retour sur une soirée mémorable pour tout fana de hardcore.
19h30. Les lumières du Batofar s’éteignent pour laisser la vedette aux anglais de NAPOLEON, récemment rajoutés au line up, qui sonneront le départ de cette tournée à l’affiche alléchante et prometteuse. Déjà connue pour une petite partie du public, la formation, menée par Alex Feggi (chant), livrera un bon set maîtrisé et emprunt d’un enjouement communicatif, malgré qu’un chouillat répétitif. L’audience, apparemment contente de voir enfin Napoleon sur les terres parisiennes après quelques péripéties et imprévus (crash de van l’été dernier…), hochera la tête au rythme de la musique pendant que les premiers rangs reprendront les paroles de l’hymne napoléonien, “Brought Here To Suffer”. La soirée commence bien !
C’est alors au tour de POLAR d’ambiancer la péniche. Et quelle ambiance. Les anglais (oui, encore) s’en sortiront haut la main devant une salle réceptive et déjà bien fournie, accueillant une poignée de fans du groupe. “Glass Cutter”, “Mountain Throne”, “Create”… une énergie débordante se dégage de la scène et tout est prétexte à mitrailler le Batofar en décibels, Polar faisant office de grosse surprise de la soirée pour leur première fois dans la capitale. Les fans se déchaînent dans la fosse, se remuent dans le pit, et s’amuseront même à grimper les poteaux de la péniche et les structures du plafond, comme tout bon show prenant place dans l’enceinte du bateau rouge. Le bal hardcore bat son plein et l’ambiance va en crescendo. Merci Polar !
Quelques balances et c’est parti pour le show (comme dirait l’autre) avec un des groupes les plus attendus du programme, les dénommés COUNTERPARTS. C’est désormais devant une péniche clairement pleine que les gaillards du Canada débutent leur set avec “Witness”, qui ne manquera pas de pousser les gymnastes du pit à faire quelques cabrioles, tout en gaieté et climat bon enfant. Il ne faudra pas plus de vingt secondes pour que les musiciens, très dynamiques au demeurant, s’approprient littéralement les quelques mètres de scène du Batofar. La qualité est au rendez-vous, et des titres comme “Reflection” seront l’exemple même d’une efficacité redoutable. Paris s’en mange plein les dents, et le concert atteindra son paroxysme à l’annonce de la très appréciée “The Disconnect”, dont le “I fucking hate the world, I fucking hate myself, I swore I’d never fucking feel like this!” sera scandé par un parterre de fans comblé.
La soirée poursuit son court, mais la formation suivante risque de vous décrocher gentillement la mâchoire d’un uppercut du gauche. Adulé par certains, renié par d’autres, HUNDREDTH n’en demeure toujours pas moins efficace en live. Le combo débutera son set sur une intro voix off d’un fameux discours tiré du film “Network” (1973), rattrapé deux minutes plus tard par le scream de Chadwick Johnson annonçant “Weathered Town” et le début d’un défilé de stagedives qui continuera sur des titres tels que “Carry On”, “Free Mind/Open Spirit” ou encore “Live Today”. Mosh, two step, side to side… Les férus du pit ont de quoi s’éclater, le tout se déroulant dans un respect et une sérénité presque miraculeuses pour un event du genre. Joel Quartuccio (chant) de Being As An Ocean s’invitera même dans la fosse en toute humilité, profitant du set et ramassant les crowdsurfers, ainsi que dans le pit pour quelques moves. En somme : une énergie dingue et un véritable concentré de qualité qui laissent l’auditoire ravi. Les claques, ça fait du bien.
Place maintenant au dernier groupe, et pas des moindres : les prêcheurs de bonne foi de BEING AS AN OCEAN. Une prestation emplie d’une passion qui prend au tripes, déjà décelable sur l’album mais multipliée par dix en live. Joel commence son set dans la fosse, des dizaines de fans l’entourent et suivent le chemin de son micro en s’égosillant littéralement sur les paroles de “Nothing, Save The Power They’re Given”. On comprend alors que ce qu’on s’apprête à voir risque d’être puissant, et l’euphorie déclenchée par le single le plus connu de la formation, “The Hardest Part Is Forgetting Those You Swore You Would Never Forget”, nous confirmera l’hypothèse et sera synonyme de véritable highlight du show. La péniche se transforme en église et une chorale prend forme à l’annonce de “Dear G-d”, dont le “I’m trying my best to be a better man, despite all my fears, I really am…” sera repris à l’unisson. C’est alors une réussite pour BAAO, qui prennent cependant plusieurs minutes pour les balances en faisant poiroter l’audience entre chaque chanson lorsque les copains des groupes précédents enchaînaient les titres. On ne leur en veut pas jusque-là, mais quatre chansons et là, c’est le drame : “Thanks guys, this is our last song.”, s’exprime le frontman. Surprise générale pour le public, BAAO joueront donc autant que les quatre autres groupes, malgré leur statut de co-headliners avec Hundredth, considérés cependant comme la tête d’affiche de la soirée. La folie devient déception, mais cela ne découragera pas l’auditoire qui s’empressera de profiter du dernier titre, “This Loneliness Won’t Be The Death Of Me”, avant qu’un rappel ne soit demandé par le public; demande qui sera exécutée par les américains. Les notes de “The People Who Share My Name” résonnent alors dans la salle, faisant couler les dernières gouttes de transpiration sur les visages des fans, avant que les musiciens ne remercient Paris pour l’accueil et s’éclipsent de la scène. Being As An Ocean, c’est court, mais c’est beau. Ni plus, ni moins.
Une excellente soirée donc, caractérisée par une très bonne ambiance générale et une bonne humeur de A à Z, ce qui, pour être honnête, arrive presque aussi souvent que les pluies d’acide. Le line up n’a pas déçu pour un sou et le public parisien passera quelques heures de live énergique et sincère dans une symbiose parfaite entre des musiciens accueillants et une audience passionnée, mêlant les cabrioles habituelles du mosh pit à des circle pits et walls of death ravageurs. Seul bémol notable : la courte durée du set de Being As An Ocean. Malgré une belle prestation mêlant passion, rage, mélancolie, douceur et poésie à la fois, cinq titres, c’est à peine le minimum syndical pour un groupe au statut d’headliners. Une date dont Paris se souviendra encore longtemps malgré tout. Hate de revoir tout ce beau monde sur les terres françaises !