Presque deux ans jour pour jour après un concert à La Maroquinerie puis une prestation endiablée à Rock En Seine, Cage The Elephant marque enfin son retour dans l’Hexagone. Rien de mieux qu’un headline pour célébrer la sortie récente de l’excellent “Tell Me I’m Pretty”, quatrième effort de la bande du Kentucky, paru en décembre dernier. Le rendez-vous est donc fixé par Nous Productions au Trabendo, et nombreux sont les conviés en ce lundi soir : le concert affiche sold out. Retour sur une une performance mémorable comme on en voit -et vit- trop, beaucoup trop peu.
20h. Après un bœuf humoristique improvisé sur scène par quelques membres de Cage The Elephant et de son crew, la soirée est véritablement lancée dès l’arrivée de CHROME PONY, quintette du Tennessee programmé pour la première fois dans la capitale. Véritable concentré d’énergie, la bande, qui vient de sortir son dernier EP “Past Lives”, livre un garage rock teinté de punk et psyché incroyablement efficace maîtrisé de bout en bout, très bien reçu par l’audience. Belle découverte.
Avec une petite demi-heure de latence nécessaire au staff, l’auditoire s’occupe comme il le peut : solo ou entre amis, il dialogue, rigole, échange, rencontre, fume, mange, boit. Mais il attend surtout l’arrivée de la tête d’affiche avec impatience, sans se douter du spectacle qui lui est réservé. En effet, dure tâche que de devoir mettre des mots sur une soirée aussi portée sur l’affect. Car, on l’annonce déjà, si nombreux furent les concerts, rarissimes furent les prestations aussi transcendantes que celle de CAGE THE ELEPHANT. 21h, les lumières s’éteignent; débarquent alors sur scène les cinq musiciens – Brad Shultz et Nick Bockrath (guitares), Matthan Minster (claviers/guitare), Daniel Tichenor (basse) et Jared Champion (batterie), rapidement rejoints par Matt Shultz, micro en main. Le temps se suspend alors un bref instant avant que ne résonnent les premières notes de “Cry Baby” : le Trabendo embarque, sans encore le savoir, pour une expérience incomparable placée sous le signe d’une communion réelle et totale.
Habité par une passion phénoménale, le frontman semble électrisé par la musique; il envoûtera la foule entière en une fraction de seconde. L’audience, particulièrement bouillonnante et réceptive, reprendra d’une seule et même voix les paroles des vingt-et-une chansons de la setlist, savante combinaison des meilleurs titres des quatre albums de la formation. Les chansons s’enchaînent mais l’effervescence demeure intacte, aussi bien pour les classiques du type “In One Ear”, “Ain’t No Rest For The Wicked” ou “Back Against The Wall” pour l’album éponyme (2008) ou bien “Aberdeen” et “Shake Me Down” pour “Thank You, Happy Birthday” (2011) que pour les pépites de “Melophobia” (2013) ou les petites nouvelles de “Tell Me I’m Pretty” qui, si plus modérées en version studio, n’ont néanmoins rien à envier en terme d’efficacité live à leurs cousines des précédents efforts. En effet, les morceaux, aussi excellents soient-ils, semblent véritablement prendre vie sur scène, tout comme le sextuor. Lorsque Brad ne vient pas à la rencontre des premiers rangs, c’est son frère qui se jette dans la foule quand bon lui semble, et inversement : on assistera à l’éveil d’une poignée de crowdsurfeurs tout au long de la soirée, souvent accueillis par les agents de sécurité, parfois repérés et tirés sur scène par les membres du groupe. Mais la soirée passe à une vitesse incroyable et vient déjà l’heure du rappel, clôturant une heure et demie d’harmonie et d’exaltation générale. Connexion, partage et proximité; le public, désormais ivre de sensations, quittera la salle avec le sentiment profond d’avoir été ranimé par ce qu’il a vu, entendu, et ressenti.
Prestation prodigieuse pour Cage The Elephant, source d’énergie inépuisable galvanisant l’assemblée de toute sa passion. Difficile de retranscrire tout ce bouillonnement à l’écrit tant la soirée fut portée par une entité indicible, une dynamique si puissante qu’elle en retourna un Trabendo entier en un claquement de doigt. Voilà l’essence-même du rock, du grand, du vrai, totalement incarnée par la bande de Bowling Green.
Setlist :
Cry Baby
In One Ear
Spiderhead
Take It Or Leave It
Aberdeen
Too Late To Say Goodbye
Cold Cold Cold
Sweetie Little Jean
Trouble
Ain’t No Rest For The Wicked
Portuguese Knife Knight
Mess Around
Telescope
Punching Bag
Back Against The Wall
It’s Just Forever
Teeth
Come A Little Closer
—-
Cigarette Daydreams
Shake Me Down
Sabertooth Tiger