Les increvables caméléons du metal japonais honorent renouveau et tradition avec un retour surenchérissant d’efficacité. RockUrLife était sur le terrain pour découvrir ce nouveau chapitre live signé Dir En Grey !
Aux armes, ô citoyens
Suivant un court DJ set juxtaposant metal alternatif, nu metal et hardcore en guise d’introduction, les lumières baissent et l’énergie est instantanément portée à ébullition. Les écrans tapissant le fond de la scène s’illuminent avec des images sombres et distordues. Et les membres s’installent un à un à leur poste sous les acclamations extatiques du public.
Méconnaissables à chaque nouvelle date, ces adeptes de la métamorphose gardent pour seule constante son armée de fans de longue date. Cette dernière est toujours aussi dévouée et fidèle à ses idoles. Une partie n’a pas hésité à passer la nuit devant la salle.
L’art de l’erotic grotesque
Kyo (chant) sort de l’ombre sous la forme d’un mime macabre à mi-chemin entre le Joker de Joaquim Phoenix et un grippe-sou décliné sous l’esthétique erotic grotesque. Les sardines du chapiteau sont plantées avec “Zetsuentai”. Ce titre imposant et schizophrénique est issu de “The Insulated World” (2018), dernier album en date qui occupe la quasi-intégralité de la setlist.
D’entrée de jeu, notre chanteur se met à l’œuvre et incarne pleinement son rôle. Il captive et sidère les regards de sa gestuelle de mime fantomatique. L’immersion au sein de ce monde circassien étrange est total. Notamment grâce au décor vidéo et au jeu de lumières brillamment calquée sur l’humeur et la narration des morceaux.
Un spectacle de maîtrise
C’est un artiste au sommet de sa discipline qui se présente au micro ce soir, démontrant maîtrise et prouesse technique avec son chant opératique et son enchaînement d’acrobaties vocales invraisemblables.
Parmi les plus belles performances de la soirée, on note les poignants “Ranunculus” et “Aka”, qui redoublent de beauté et de poigne sous les lumières d’une scène impeccablement maîtrisée. Le jeu est d’une précision chirurgicale; les instrumentistes restent plantés sur leur position mais gardent une bonne présence du fait de leur look glam flamboyant et des petits sourires ravis trahissant la façade ténébreuse du groupe.
Malgré la logistique impressionnante du spectacle audiovisuel, le set préserve l’aspect naturel et spontané d’un concert plutôt qu’une mise en scène millimétrée. Bloqués par la barrière linguistique, le mime et sa troupe restent muet entre les morceaux. Mais leur silence ne se fait à peine remarquer.
Nouveau fond, même forme
Les habitués ont reconnu le mix auquel le mixage sonore habituel du groupe. Le son est précis et fidèle au rendu studio. Quoique regrettablement peu fourni en terme de basses et de définition sur la caisse claire, qui ne perce que timidement l’ensemble. Un peu plus de coffre aurait été le bienvenu pour ajouter un peu de relief au son. Même si le quintette s’en sort plus que convenablement.
Une fois de plus, les fans de longue date se retrouvent quelque peu déçus de l’absence de titres phares comme “The Final”, “Lotus”, “Saku” ou même “Obscure”. La tradition reste la même. Seule une demi-poignée de morceaux plus anciens font office de surprise au milieu de ce spectacle immersif. Cette fois, on a droit à un “Merciless Cult” assez fidèle mais toujours aussi jouissif à moitié du set, suivi de “THE DEEPER VILENESS” qui refait peau neuve sur scène.
Avec un “Sustain The Untruth” d’une efficacité monstrueuse en bouquet final, la troupe clôture la soirée en signant sa glorieuse victoire d’un trait ferme.
Au sein du public, le verdict est unanime. Ce soir, le public français s’incline une nouvelle fois devant la splendeur du Japon dans tout ce qu’elle a de plus illustre et macabre.