Dans la famille des guitaristes de légende, on demande Joe Bonamassa ! Gratteux virtuose, l’Américain ne s’était pas produit à Paris depuis deux ans. Mais ça c’était avant La Seine Musicale. Récit d’un concert-jukebox savoureux !
Gérard Drouot Productions et La Seine Musicale avaient été clairs : le concert commencera à 20h et il n’y aura pas de première partie.
C’est donc dans une salle pleine à craquer que nous prenons place. 19h57, un noir d’encre s’abat sur le public. Trois minutes plus tard, Joe Bonamassa fait son entrée. Lunettes noires vissées sur le nez, il entonne les premiers mots du classique de Muddy Waters “Tiger In Your Tank”. A moitié dissimulée par de gigantesques pupitres vintages, sa section de cuivres de voyage se déchaine déjà. Le ton est donné !
Alors que le bassiste Michael Rhodes agite ses cannes de serin sur “King Bee Shakedown”, Reese Wynans fait trembler ses claviers avec force dextérité. Bonamassa mime des applaudissements. L’assemblée s’exécute. Mais comment pourrait-il en être autrement ? “Just ‘Cause You Can Don’t Mean You Should” s’étire sur de longues minutes.
Convoquant tantôt David Gilmour tantôt Stevie Ray Vaughan, Bonamassa fait figure de bon élève du blues. Un peu trop peut-être. Calibré à l’extrême, son récital fourmille de riffs mais demeure surprenamment froid. L’audience applaudit poliment mais ne bouge que modérément. Est-ce du respect ou de la fatigue ? Allez savoir. Plusieurs téléphones portables s’élèvent néanmoins lorsque résonnent les premières notes de “Sloe Gin”. On ne se refait pas !
Bonamassa retire ses lunettes le temps d’ouvrir une bouteille de bière. Quelques irréductibles se dressent et entonnent “Happy Birthday”. Le chanteur esquisse un sourire : “J’accepte humblement vos applaudissements et votre chanson. Je m’en sors pas trop mal pour un vieux en costume !” Rires nourris. “C’est l’heure du dîner en plus, alors merci d’être venu si nombreux !”
On ne sait si ce sont les blagues du chanteur ou la perspective de bientôt manger qui réveillent les quelques quatre milles personnes installées sous le dôme de la Seine Musicale, mais elles commencent enfin à s’agiter et à applaudir… plus ou moins en rythme. Elles quittent même des tribunes aux premières mesures de “Woke Up Dreaming” et se massent près de la scène. Bonamassa caresse sa guitare, un temps devenu violon. Rares sont les musiciens à pouvoir imposer le respect avec autant de facilité. Et quand il quitte la scène à 22h17 – deux minutes de rab, quel luxe ! –
On est certain d’une chose : Des claques comme ça, on en voudrait tous les jours !