Un festival sans au minimum un jour de pluie, n’est pas un vrai festival. Si le temps aura plutôt été clément durant les trois premiers jours, ce ne sera pas le cas pour ce dimanche. Les parapluies et bottes sont donc de sortie.
AMELIE MCCANDLESS (Scène Les Illuminations) – Comme depuis vendredi, l’ouverture du Cabaret Vert se fait sur l’une des formations de la scène régionale. Aux côtés de Gabin (guitare, choeurs) et Vincent (batterie), la rémoise inaugure cette ultime journée en douceur, avec une folk, à la fois, douce et sauvage, influencée par l’univers du film “Into The Wild” (son nom de scène en fait référence au héros Christopher McCandless), Bob Dylan ou encore Bon Iver. Avec ses compositions délivrant un message de paix, de liberté et de retour aux valeurs essentielles, ce set colle parfaitement à l’ambiance woodstockienne régnant sur le Square Bayard, boueux en cet après-midi.
PUTS MARIE (Scène Zanzibar) – 16h30, il y a encore peu de monde devant la scène principale du Cab’, sans doute en raison des mauvaises conditions météorologiques. Seuls quelques courageux se posteront aux barrières. Le quintette, emmené par le loufoque Max Usata, balance un rock outrancier et saturé, quelque peu progressif sur les bords. La voix du chanteur tel un écorché vif, oscille entre chant clair et hurlement et rappelle même un certain Asaf Avidan ou encore Charlie Winston.
SENS UNIQUE (Scène Les Illuminations) – Originaire des Ardennes, le quatuor, second groupe régional du jour, possède sa propre recette : du hard rock FM, des guitares énergiques et des textes poétiques, prenants et tourmentées en français. Du Noir Désir en somme, à l’exception du look de metalleux des musiciens. Et ça joue fort !
KITTY, DAISY & LEWIS (Scène Zanzibar) – La grande scène du festival porte les couleurs du troisième album, sobrement baptisé “The Third”, représentant trois portraits de profil d’une reine, le troisième étant à l’envers, contrairement aux deux autres. La pluie fait son retour, mais ce n’est pas cela qui va nous empêcher d’apprécier le set, introduit par le fameux instrumental “Popcorn” rappelant les années 80. Comme les précédents groupes à l’affiche du festival, A-Vox ou encore Brothers, cette formation anglaise est composée de deux soeurs look pin-up et d’un frère latino de la famille Durham. Leur truc ? Le bon son vintage des 50’s aux influences diverses comme le rockabilly, le reggae, le rock, le boogie, le jazz, la country, sur fond de musique rhythm & blues, ska, rock, blues, salsa, swing et même de la musique hawaïenne, nous transportant instantanément à l’époque. Sur scène, le trio, accompagné par leurs parents Graeme (guitare) et Ingrid (contrebasse) sans oublier Eddie Thornton (trompette), est multi-instrumentaliste et échange souvent ses instruments (xylophone, ukulélé, accordéon, piano, banjo, batterie sommaire, harmonica), notamment sur le single “Baby Bye Bye” interprété par Lewis au chant et au piano. Un set chaleureux au groove irrésistible qui plaira à tous, de 7 à 77 ans. La découverte du jour, qui nous aura presque fait oublier la flotte et le déploiement de multiples parapluies multicolores envahissant le Stade Bayard !
TYLER, THE CREATOR – (Scène Les Illuminations) – Ce n’est pas du tout notre registre, mais nous avons quand même assisté au set. Il semble bien que ce jeune prodige du hip hop made in West Coast, 24 ans, au succès grandissant tant au sein d’Odd Future qu’en solo, déchaîne les passions. On en juge par le nombre de festivaliers sur la Plaine De La Macérienne, transformée en un trampoline géant !
HUBERT FELIX THIEFAINE (Scène Zanzibar) – Après la tempête Tyler, une croûte ardennaise et un pâté en croc, place à la tête d’affiche de ce quatrième jour, mais aussi notre concert final de cette édition. Le chanteur, en costume noir, est entouré d’un groupe de quatre musiciens, dont son propre fils, Lucas, à la guitare, prêchera avec sa chanson française, tant mélancolique que revendicative. Habité par ses compositions, le frontman au visage marqué par la vie et aux yeux fermés, ne cesse de communiquer avec sa gestuelle, mais aussi avec ses histoires racontées dans des textes poétiques (nostalgie, amour, mort, espoir, campagne…) et sa voix grave et chaude sur une base instrumentale rock. Comble du hasard, au moment d’évoquer un arc en ciel dans l’une de ses chansons, un double phénomène se produira instantanément dans le ciel. Toujours “à fond la caisse et dans l’ivresse” depuis quarante ans, ce monument de la chanson française à texte, certes moins médiatisé que Johnny et compagnie, n’en demeure pas moins l’un des artistes les plus engagés et talentueux depuis plusieurs générations.
Rassemblant plus de 85 500 festivaliers sur les quatre jours, cette 11ème édition du Cabaret Vert aura été une réussite, avec un taux de remplissage de 90%, deux soirées complètes (samedi et dimanche) et un camping complet. Préférant miser sur la qualité que sur la quantité, contrairement à la plupart des autres festivals de l’Hexagone, et ce malgré une légère baisse de la jauge d’accueil en comparaison à l’an dernier. Cela dit, cette baisse a permis une meilleure circulation et moins d’attente sur le site. Ainsi, le projet, démarré en 2004 avec seulement 400 euros en poche, est aujourd’hui autofinancé à 85%, et a désormais de beaux jours devant lui avec de nouvelles perspectives, mais où les maîtres mots seront toujours : qualité, continuité, sécurité, exemplarité.
Pour notre tout premier rodeo trip, il faut bien avouer qu’autant sur papier que dans la réalité, Le Cabaret Vert tient toutes ses promesses, sauf pour la wifi gratuite qui n’a jamais réussi à fonctionner sur place.
Il s’agit effectivement d’un festival à l’ambiance particulière où il fait bon vivre. Si seulement tous les festivals de France étaient de la sorte : bonne programmation dans l’ensemble (avec peut-être un peu plus d’électro et moins de rock cette année), de la bonne bouffe (assiette de sanglier, cacasse-à-cul-nu, croûte ardennaise, pâté en croûte, salade au lard, tarte au maroilles, sandwich à la saucisse de sanglier, galette à suc’…) et de la bonne bière (Chouffe, Ardwen, Oubliette, Chimay…). Le tout suivant respectueusement une charte de restauration durable : du local, du terroir, du circuit-court et des denrées produites à moins de 200 kilomètres de Charleville-Mézières, afin de faire tourner l’économie locale. Et surtout, à petit prix (liste de la nourriture et des bières précédemment cités, testée et approuvée !). Mention spéciale au centre de tri sur le site du festival où les déchets sont triés sur place, une initiative naturelle pour Le Cabaret Vert, mais sur laquelle devrait prendre exemple bon nombre de festivals ! Seul bémol : à force de pousser le concept écologique, il faudrait peut être penser à faire appel à des artistes utilisant un minimum de ressources, ou étant prêts à s’adapter, et ainsi éviter les nombreuses coupures du générateur électrique qui se sont produites à plusieurs reprises durant ces quatre jours (Paul Kalkbrenner et The Chemical Brothers notamment).
Quoi qu’il en soit, RockUrLife reviendra dans cette belle région qu’est le 08, c’est certain ! Il parait que la prochaine édition, douzième du nom, se tiendra à nouveau fin août, sur le même week-end que Rock En Seine, afin de permettre au festival de recevoir davantage l’aide de bénévoles (qui étaient au total 1575 en 2015). A choisir avec le festival francilien, il n’y a franchement aucune hésitation, sans pour autant dénigrer l’événement basé au Domaine National De Saint Cloud. Mieux, on sera aux deux !
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