Assister au concert d’un vainqueur de l’Eurovision est chose assez rare pour être décemment manquée. Néanmoins, on reste bien loin de l’affluence présente au même endroit quarante-huit heures plus tôt (ndlr : Testament) pour accueillir les Finlandais de Lordi. Date en début de semaine ? Temps exécrable ? Ajouté à cela, un running order prévoyant une fin de concert vers minuit. Et des transports en communs autour du Bikini (salle excentrée à Ramonville) peu pratiques. Il fallait être déterminé ce soir !
Atchoum
Quoiqu’il en soit, les Allemands d’AETERNITAS investissent la scène peu après l’ouverture des portes. Que dire à part que leur metal symphonique moderne ont pu être efficace sans les problèmes de Julian Marou (chant), côté justesse, profondeur, timbre mais également de Alex Hunzinger (guitare/chant).
L’ensemble du groupe manque clairement de charisme, y compris la chanteuse qui semble en plus avoir du mal à se situer sur scène. A tel point que, tout cumulé, on peut sérieusement se poser la question de savoir s’il ne s’agit pas d’un groupe amateur local.
Le titre “Experiment” souffre énormément du sur-mixage de la double grosse caisse et évidemment des deux voix, également très fortes. Après “The Raven”, un nouveau titre se présente comme un hommage à Lordi. Le refrain étant “Lordi! Lordi! Lordi!”, sans surprise donc, malgré les réactions mitigées du public.
Metal Forbans
C’est ensuite au tour des Finlandais de FLESH ROXON. Autre ambiance avec ce groupe d’horror-punk à tendance psychobilly. Les yeux ne sont pas uniquement rivés sur Nicky Rothen (chant/guitare), mais également sur Tommy The Mummy (contrebasse). Le toucher unique de cet instrument apporte une grande partie de l’identité sonore du quintette de Tampere. Si sa musique a plus sa place à la fête de l’Huma ou à Solidays, force est de constater que la formation fait mouche devant une audience conquise et qui en demande plus.
Le point fort du set étant la reprise -revue- d’Haddaway “What Is Love” qui provoque un sacré délire collectif, de la bonne humeur, tout simplement ! Point négatif, un bruit parasite non identifié tout le long du set provenant de la batterie, comme si un autre batteur était en train de s’échauffer derrière le kit en tapant ses baguettes au sol. Une sorte d’écho décalé. Malgré un style décalé, c’est une réussite !
Du grand Guignol d’horreur d’école
Suite à un changement de plateau des plus décontractés, avec des techniciens souriants, l’heure est arrivée. Après une longue introduction composé de trois parties, dont deux tirées du nouvel album “Killection“, LORDI débarque sur scène sous les vivas de l’assemblée. La scène est plantée. Sur notre gauche, Hiisi (basse) doté d’un masque de crâne qui n’aurait pas dépareillé dans “Predator”, Mana (batterie), présent depuis 2012, en remplacement du défunt Otus. Sur notre droite, le momifié Amen (guitare). Puis la belle Hella (claviers) avec son masque de poupée de cire malsain et ses sempiternels soubresauts lorsqu’elle joue. Beaucoup de décors sur scène et c’est bien entendu au centre que se trouve la tanière de Mr. Lordi (chant), protégée par un rideau représentant sa trogne satanique.
Bien que le frontman soit énervé du mixage sur “Horror For Hire”, le son est bon, puissant, et les claviers apportent cette dimension nécessaire pour être audible. L’enchaînement des morceaux est régulièrement agrémenté d’interventions humoristiques de Mr. Lordi : “Je sais qu’on est lundi soir, mais vous direz demain à vos professeurs ou à vos patrons qu’ils aillent se faire foutre, que vous faisiez la fête avec Lordi !”. Ou “On va interpréter ce soir des raretés peu ou jamais jouées auparavant. Bon OK, on les joue sur cette tournée. Mais vous avez compris. D’ailleurs hier, on a été nuls. Qui sait, on sera peut-être aussi nuls ce soir !”.
Gore & sweet rock n’roll
L’ambiance visuelle et musicale rappelle par moment l’univers de Rob Zombie (“Shake The Baby Silent”). Ou Alice Cooper et King Diamond par exemple. Notamment sur tous les titres où des figurants interviennent dans le but de faire “peur” et d’instaurer une ambiance glauque et malsaine. Mais de manière extrêmement kitsch : la grand-mère courbée et décrépie mais rapide sur “Granny’s Gone Crazy”, l’homme se faisant découper à la scie circulaire sur “Naked In My Cellar”, un fantôme qui fonce sur les premiers rangs sur “The Ghosts Of Heceta Head” ou encore le Skeletor tenant la tête de Musclor sur “Let’s Go Slaughter He-Man (I Wanna Be The Beast-Man In The Masters Of The Universe)”, bel hommage au dessin-animé créé initialement pour vendre des jouets. Le spectacle est au rendez-vous et dans les règles de l’art s’il vous plait !
En tant qu’ex-président de la KISS Army finlandaise, Mr. Lordi demande justement à l’auditoire s’il y a des membres de la KISS Army présents ce soir. Pas peu fier d’annoncer les co-auteurs du prochain titre “Like A Bee To The Honey”. A savoir Jean Beauvoir, à qui l’on doit “Feel The Heat” (B.O. de “Cobra” de Stallone) mais surtout Paul Stanley. “Vous imaginez l’honneur que c’est pour nous”.
Nous nous rappellerons longtemps les hilarants “You wanna get à poil ?” répétés avant le pertinent “Naked In My Cellar”. Vous l’aurez compris, on peut aimer la viandasse, le sang, les bébés morts accrochés au pied du synthé et autres têtes cadavériques disséminées partout et avoir de l’humour.
A l’heure du rappel, certains avaient déjà quitté les lieux en raison de l’heure tardive. Le final est dans le même ton, Amen consultant son grimoire avant “Devil Is A Loser”, et les grandes ailes démoniaques déployées par le chanteur pourrissant sur “Would You Love A Monsterman?”.
Impossible de ne pas passer une bonne soirée avec Lordi, qu’on se le dise !