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MaMA 2019 : on y était !

Comme chaque année, Pigalle-Montmartre, et plus particulièrement ses salles de concerts, est en pleine effervescence pour LE rendez-vous destiné aux professionnels et amateurs de musique. 2019 marque le dixième anniversaire du MaMA !

D’habitude déjà bien animé, le dix-huitième arrondissement connait un pic du 16 au 18 octobre grâce à l’agitation régnante autour du MaMA Festival & Convention. Difficile de ne pas repérer les professionnels de l’industrie musicale internationale et leurs tours de cou et bracelets, déambulant principalement entre le Trianon et l’Elysée Montmartre où se déroulent la plupart des ateliers et conférences.

Le soir, le MaMA accueille une flopée de concerts que ce soit à La Cigale, La Boule Noire, La Machine Du Moulin Rouge ou encore le Bus Palladium. Malheureusement, cette année, force est de constater que la programmation présente très peu de rock. Au fil des éditions, ce style si cher à nos yeux diminue à vue d’œil depuis quelques années maintenant. Et c’est bien dommage.

Rock n’roll, où es-tu ?

Mais est-ce bien surprenant ? Le paysage musical français ne fait pas la part belle au rock. Bien que les festivals rock et metal attirent du beau monde, cela reste malgré tout quasiment négligeable. En effet, la musique urbaine est ce qui marche le plus actuellement en France. Nous, pauvres rockeurs, avons toujours mal à nos petits cœurs en faisant ce constat. Même si nous ne cherchons pas à être le “mouvement” en vogue, mais simplement être considérés à notre juste valeur. (On pourrait y passer des heures).

Au travers de plusieurs conférences et ateliers, on saisit d’emblée que le socle de discussion est déjà orienté. Lorsque l’on évoque le cas de l’artiste entrepreneur, exemple utilisé Lomepal, avec une partie de ses collaborateurs, on saisit que ce modèle-là est spécifique. De toute évidence, certains artistes souhaitent s’occuper de tous les aspects. Mais il faut de gros moyens et tout le monde ne peut répondre financièrement à ses envies. Il est néanmoins toujours intéressant de saisir les diverses subtilités.

Autre conférence, du côté de la FGO Barbara, le développement de sa carrière à l’heure du streaming. Ah ce bon vieux streaming qui régit le marché et qui ne rémunère pas correctement les artistes. L’aspect abordé ici, est différent. La plateforme Spinnup (appartenant à Universal) permet à chacun de mettre en ligne sa musique sur les diverses plateformes, tout en ayant une petite attache chez Universal donc. C’est à dire que les équipes et différentes sections du label, peuvent y jeter un œil et remarquer un ou des artistes intéressants pour leur catalogue. Mais comment ressortir du lot ? Là est toute la question. L’image, l’histoire, la communauté, tout y passe. Mais on a parfois l’impression que la musique passe au second, voir troisième plan.

Côté artiste, côté pro’

Du côté du Trianon, l’autoproduction y est également abordée, tout comme l’aspect promotionnel à envisager lorsque l’on prépare une sortie. Mais l’envers du décor est aussi de mise. Ainsi, les métiers de la communication, avec des intervenants venant de Polydor mais aussi des indépendants, évoquent leurs rôles. Des cas généraux à des questions très spécifiques, on saisit le rôle des community manager qui doivent faire face à telle ou telle requête. Sans doute là l’un des ateliers les plus intéressants du festival; l’échange entre les intervenants et le public présent étant très constructif.

On regrette le couac concernant la Masterclass de Spotify France, au Bus Palladium. L’événement était uniquement accessible sur inscription or l’information n’a jamais été précisée en ligne. Une amertume partagée avec beaucoup. Il est fort dommageable d’avoir prévu cela dans un si petit lieu, pour une audience limitée alors que Spotify est un poids lourd du streaming. Tant pis.

Autrement et plus globalement, les structures connues sont, comme toujours, présentes telles que la Sacem ou l’Irma pour ne citer qu’elles. Côté Trianon, différents stands mettent en avant des outils pouvant accompagner les professionnels. Que ce soit pour gérer des aspects administratifs, l’organisation ou la billetterie. Présentons les comme l’espace “innovation”. Comme quoi, l’écosystème entourant la musique est dynamique et certains ont leurs cartes à jouer.

Les thématiques, elles, sont de plus en plus pointues mais on sent clairement que le streaming, les revenus liés à celui-ci, et les algorithmes qui se cachent derrière ces systèmes sont devenus l’une des préoccupations majeures des distributeurs et des artistes. De quoi nous occuper un bon moment encore !

Du live à petite dose

Notre curiosité nous pousse tout de même à assister à la soirée de La Boule Noire du mercredi 16 octobre. A l’affiche : une soirée rock en compagnie de The Pier, Sooma, LA Jungle et It It Anita.

Alors que THE PIER, premier groupe à inaugurer La Boule Noire ce soir n’est même pas encore sur scène, le palmier gonflable en guise de scénographie cheap nous fait craindre le pire. Ce sentiment se confirme plus ou moins à l’arrivée du quatuor italien. Le chanteur et le guitariste débarquent en… caleçon. OK.

Dès les premières notes, on assiste à une cacophonie, à la limite d’une bouillie sonore. Le chanteur chante en effet sur des bandes en plus d’une mauvaise qualité sonore. On ne distingue pas grand chose, si ce n’est que les morceaux sont courts et rapides. Certains avec des paroles, d’autres totalement instrumentaux. On dirait du sous Foals, version punk progressif, avec de longues parties instrumentales.

Même si la salle n’est pas complète, il y a du monde devant cette prestation de plus de trente minutes assez surprenante, notamment la modification vocale robotique sur l’avant-dernière chanson.

Le set de The Pier se termine sur “It Will Work”, l’un des morceaux du dernier album “Dead Reckoning” (2018) et ne porte malheureusement pas son nom. Cela ne fonctionne pas pour The Pier : bonne prestation math rock/rock alternatif, mais sans valeur ajoutée.

Ensuite, place à SOOMA, un trio suisse chant/guitare-basse-batterie. Tout ce qu’il y a de plus classique. Comme le premier groupe, les titres joués sont assez rapides. Alors que le son est déjà très fort, un spectateur dans l’assemblée réclame qu’on augmente davantage le volume !

A part se remuer et headbanguer, les musiciens restent plutôt statiques, préférant rester concentrés sur leur performance carrée. Il y a une belle synergie entre Yannick Consaël, Victor Rassov et Fidel Aeberli, totalement synchronisés et énergiques. Au fil du set, les trois se lâchent de plus en plus tout en restant focus sur leur prestation.

Hormis les premiers rangs, seuls de timides têtes bougent face à ce grunge/noise rock/punk rock assez répétitif. N’est pas Nirvana qui veut, et encore moins Kurt Cobain !

Sur la fin, le set traîne en longueur et se termine sur un larsen, crée par le contact de la guitare sur un ampli.

La soirée se poursuit avec les Belges de LA JUNGLE. Sur scène, on retrouve un duo formé par Jim et Roxie. Un kit de batterie simple à gauche et le chanteur à la basse et aux machines à droite.

C’est une toute autre ambiance, un rock expérimental, allant de la noise jusqu’au kraut rock, soutenu par une puissante batterie. D’ailleurs, le batteur frappe tellement fort que son kit ne cesse de trembler, tandis que le chant est, quant à lui, mystique. Il n’y en a pas beaucoup, contrairement aux parties instrumentales, volontairement lancinantes et hypnotiques.

On note une originalité du groupe : le chanteur, qui fait de drôles de mimiques, s’enregistre en live et repasse ces mêmes enregistrements pour les rejouer en loop.

Enfin, c’est au tour de IT IT ANITA de conclure cette première soirée rock à La Boule Noire, mais aussi la dernière de cette dixième édition pour nous.

Cette dixième édition du MaMA a rassemblé plus de 5800 professionnels accrédités et un public toujours plus nombreux. Cela confirme et conforte son statut de rendez-vous professionnel incontournable. Mais on regrette que, d’année en année, le rock ne représente qu’une infime partie des artistes présents lors de cet événement. Bien qu’international et majeur dans le domaine des rencontres professionnelles, le festival se dit défricheur. Un peu plus de rock en 2020 s’il vous plait ?

Anthony Bé
Fondateur - Rédacteur en chef du webzine RockUrLife