Sobrement intitulée “The Past Is Alive”, cette tournée Mayhem/Watain est une opportunité en or pour tout fan de black metal de voir chaque groupe jouer son album culte. La date affiche sold out, ce qui n’est pas une surprise quand on sait que Watain remplissait déjà le Trabendo à lui seul il y a pile trois ans.
Premières impressions une fois dans l’antre du mal : on ne voit pas à deux mètres et pour cause : quelqu’un a visiblement abusé de la machine à fumée. A 20h tapante, WATAIN investit la scène pour jouer “Casus Luciferi” (2003) en entier et dans l’ordre. S’il s’agit de l’album emblématique du groupe, on est loin du tournant mélodique qu’il avait amorcé sur son dernier opus “The Wild Hunt”, dix ans plus tard. Seule la noirceur a sa place, les Suédois jouent vite, de manière précise et sans interruption. La scénographie est toujours aussi soignée : des torches de feu sont disposées un peu partout et des ossements d’animaux ornent les contours de la scène.
Erik Danielsson, le chanteur à l’allure prophétique, est toujours le centre des regards et s’adonne à sa cérémonie, sorte de rituel satanique un peu douteux mais qui confère une certaine ambiance au set. Jamais la pression ne quitte le set de Watain, qui reste d’une noirceur sans égale, même lors de passages plus lourds comme sur la pesante “Puzzles Ov Flesh”. La fin du set gagne même en intensité sur la chanson titre “Casus Luciferi” où le frontman verse son traditionnel calice de sang sur le premier rang. Ce petit retour en arrière de cinquante minutes, bien qu”il soit une réussite totale, fait tout de même regretter l’absence d’un ou deux titres plus mélodiques.
Une demi-heure plus tard, les Norvégiens de MAYHEM foulent la scène après une longue intro samplée qui instaure une atmosphère… peu rassurante. Les musiciens sont vite rejoints par Attila Csihar pour interpréter l’un des albums les plus cultes du black metal dans son intégralité et dans l’ordre : “De Mysteriis Dom Sathanas”. Seul à ne pas être encapuchonné, Necrobutcher et sa basse n’auront jamais autant résonné, l’instrument occupant une place de marque sur le disque.
D’emblée sur “Funeral Fog”, l’ambiance glace le sang : Attila et sa voix caverneuse reproduisent à l’identique ce qui était proposé sur DMDS, vingt-deux ans auparavant. Quoi de mieux qu’un mélange de light bleutées et de fumée pour jouer l’hymne “Freezing Moon”, dont la célèbre introduction fige tout le monde sur place. Bien qu’encapuchonné, Attila est maquillé et se prête à des jeux de visages terrifiants alors qu’ils vocifèrent tour à tour des voix graves et possédées, comme sur “Cursed In Eternity”. Chaque chanson se termine par un sample qui instaure une atmosphère lugubre et assure la transition de cette épopée cauchemardesque.
Si Watain continue de jouer sa panoplie du rituel un peu cliché sur les bords, Mayhem, par sa sobriété et son absence de mise en scène, permet de se concentrer corps et âme sur le concert en lui-même, véritable ode à un ésotérisme noir sans concession. L’ensemble est soutenu par des rythmes et des lights stroboscopiques parfois à la limite de l’insoutenable. Les sept-cent âmes errantes du Trabendo ont voulu mettre à l’épreuve “The True Mayhem” ce soir mais il semblerait bien que ce soir l’inverse : les Norvégiens ne font pas de cadeaux à leur public. Pas de communication, on revient à ce qui a fait les fondements et la réputation du style. Après un peu plus d’une heure de set, Mayhem quitte une seconde fois la scène pour la réinvestir après une énième sample infernale, et assène un ultime assaut, une dernière sauvagerie avec la chanson titre.
Alors que le public semble rester abasourdi devant les deux prestations de ces formations cultes du genre, on ne peut s’empêcher de penser que la tournée “The Past Is Alive” porte sacrément bien son nom. Pour ceux qui n’ont pas pu répondre à l’appel, Mayhem propose une séance de rattrapage le 3 avril 2017 à l’Empreinte de Savigny le Temple (77).
Setlist :
Funeral Fog
Freezing Moon
Cursed In Eternity
Pagan Fears
Life Eternal
From The Dark Past
Buried By Time And Dust
De Mysteriis Dom Sathanas