Le mardi 6 décembre dernier, Meshuggah était aux commandes du Bataclan pour sa tournée européenne, deux mois après la sortie de son huitième album studio “The Violent Sleep Of Reason”. Le groupe suédois metal progressif y a signé un quasi sans faute. Retour sur un concert d’exception qui nous a aussi offert une belle synthèse des précédents opus, remontant jusqu’aux fameux “Destroy Erase Improve” (1995) et “Chaosphere” (1998).
La salle est déjà bien comble lorsque les trois membres de HIGH ON FIRE, formation sludge fondée en 1988 par le guitariste de Sleep, arrivent sur scène. Les Californiens, emmenés par leur frontman Matt Pike, assurent un set efficace qui nous offre un bel aperçu de leur talent de compositeurs, qu’on peut redécouvrir grâce à l’album “Luminiferous” paru l’an dernier.
C’est néanmoins aux musiciens de MESHUGGAH que la foule réservera son accueil le plus chaleureux. Plongé dans la pénombre, le Bataclan vibre sous nos pieds dès les premières notes, tandis que nos pupilles se dilatent pour apercevoir les minces silhouettes des musiciens se détacher devant les lasers bleus bégayant à toute vitesse. L’immersion dans l’univers robotique des Suédois fonctionne à merveille, la coordination rythmique de Tomas Haake (batterie), Fredrik Thordendal et Mårten Hagström (guitares) atteignant la perfection. Les morceaux du dernier opus, “Clockworks” et “Born In Dissonance” offrent une introduction homogène et solide au son massif du quintette, alors que les rugissements de Jens Kidman (chant) emplissent la salle.
Le son semble gagner en intensité au fur et à mesure du set, nous plongeant dans une atmosphère ultra dense, presque suffocante, ou tout hypnotise, de l’intensité quasi sismique des (poly)rythmes à l’énergie glaçante et presque déshumanisante des riffs. Ce qui s’explique peut être par le choix de Meshuggah de mettre à contribution ses anciens disques, aux sonorités plus numérique et moins organique, à l’instar de “Koloss” (2012) ou de “ObZen” (2008). Quintessence du second, le morceau “Lethargica” fait mouche dans une fosse déchaînée par le chant rauque et très régulier de Kidman, qui se distinguera également sur le dissonant et énigmatique “Dancers To A Discordant System”. L’un des rares temps morts du concert s’expliquera d’ailleurs par les applaudissements très nourris qui salueront la prestation.
Au bout d’une heure, ne manquent à l’appel plus que les les célèbres “Bleed” et “Demiurge”, qui comptent parmi les hymnes marquants du groupe et du son nouveau qu’il a largement contribué à créer, le djent. L’occasion pour Tomas Haake de nous gratifier de son double bass drumming à la complexité presque inhumaine, qui, ajouté au fracas cataclysmique des huit cordes, termine de nous achever. La rétrospective s’achèvera là ou tout a commencé, avec “Future Breed Machine”, premier morceau de “Destroy Erase Improve” qui allait se révéler décisif dans les futures orientations artistiques des Suédois.
Avant de se quitter, groggy par ce déluge de sons, on se dit que Meshuggah chemine dans sa voie avec la quiétude du créateur qui s’est accompli mais qui ne s’endort pas sur ses faits d’armes, pourtant nombreux. Soit la marque des grands musiciens.
Setlist :
Clockworks
Born In Dissonance
Sane
Perpetual Black Second
Stengah
The Hurt That Finds You First
Lethargica
Do Not Look Down
Nostrum
Violent Sleep O Reason
Dancers To A Discordant System
Bleed
—-
Demiurge
Future Breed Machine