Le “Headbangers Ball”, show télé popularisé dans les années 80 par MTV revient cette année au Bataclan pour sa tournée européenne avec une programmation éclectique, passant du metalcore au viking death metal, jusqu’au heavy. Retour sur un concert qui a réuni dans une atmosphère bon enfant quatre têtes d’affiches très attendues.
La tâche d’ouvrir le bal aurait été difficile pour un groupe autre qu’UNEARTH, formation de metalcore. Les Américains ont visiblement décidé de faire parler l’expérience -et la poudre- en jouant des classiques de leur discographie qui depuis 1999 monte en puissance tout en gagnant en maturité. Le pit, clairsemé au départ, grossit à vue d’oeil face à l’énergie déployée par le charismatique Trevor Phipps, dont le chant abrasif est parfaitement servi par les riffs décapants des guitaristes Buz McGrath et Ken Susi. Les incursions mélodiques du premier, notamment sur “Never Cease” et “My Will Be Done” oxygénisent les titres, leur donnant un souffle original qu’on trouve rarement dans l’univers coreux. Impression renforcée par les nombreux changements de tempos du batteur, qui nous changent des habituelles successions de breakdowns dont le genre est coutumier. Le groupe, acclamé par la fosse, nous quitte en teasant l’arrivée du prochain album en 2017 qu’on s’empressera d’écouter.
C’est désormais devant une foule compacte que KATAKLYSM prend la relève. Le groupe canadien deathcore, emmené par un Maurizio Iacono toujours aussi complice avec la fosse, commence sur les chapeaux de roue en jouant “Breaching The Asylum” et “The Last Sheep”. Sur “As I Slither”, encouragés par un Iacono taquin et visiblement fin connaisseur de leurs goûts, les fans se jettent dans le premier circle pit de la soirée. Le chanteur nous fait aimer ses intermèdes joyeux qui lui permettent de tancer un type qui s’est manifestement trop abreuvé au bar, ou de tester notre piteux accent canadien. Son principal soliste, Jean-François Dagenais, donne une dynamique accrocheuse à chaque morceau; certains solos manqueront toutefois de précision, voire seront complètement massacrés- notamment sur “Blood In Heaven”. On n’oublie pas Oli Beaudoin, très présent derrière les fûts, assurant breaks et passages rapides avec aisance, comme sur le très réussi “Thy Serpent’s Tongue”. Comme pour leurs prédécesseurs, on garde une bonne impression des cousins canadiens en sortant de leur show, varié et bougrement efficace.
Le changement de plateau laisse place à d’autres nordistes, européens cette fois : les Finlandais d’ENSIFERUM, qui arrivent sur scène croix noire peinte sur le visage. Le groupe de viking métal entame un set varié, qui mêlera des titres aux tendances folks, voire disco- notamment l’étonnant “Two Of Spades”, avec des morceaux plus heavy. Le ton épique fait souffler une vague de bonne humeur qui égaye la salle, admirative des chanteurs Markus Toivonen et Petri Lindroos. La versatilité de ce dernier, passant facilement d’une voix claire au chant guttural semble donner aux chansons plusieurs vies. Le public le suit en choeur lorsqu’il entame le refrain à la mélodie irrésistible de “Warrior Without A War”, aux côtés de Toivonen et du bassiste Sami Hinkka. Ce choeur puissant et lyrique nous remue les entrailles, menant le set à son climax. Plusieurs suivront, et remporteront une franche adhésion, comme sur “Heathen Horde”. Les solos des deux guitaristes terminent d’électriser une foule conquise par le son pittoresque des Finlandais, enrichi par le jeu de leur nouvelle accordéoniste. Le show se termine sur le très folk “Lai Lai Hei”, un classique du combo fortement apprécié qui nous laissera de très bons souvenirs. On salue à leur sortie les artistes qui se sont nettement démarqués lors de la soirée.
Le concert se terminera logiquement par la prestation du très expérimenté groupe de power metal ICED EARTH. Là aussi la formation nous offre une belle rétrospective, en jouant de nombreux titres piochés dans les albums “The Dark Saga” (1996) et “Something Wicked This Way Comes” (1998). On n’oubliera pas de sitôt le talent du nouveau guitariste soliste Jake Dreyer, âgé de seulement 24 ans. Son jeu précis et rapide ajoute aux morceaux de belles plages mélodiques que son acolyte Jon Schaffer complète avec de solides rythmiques heavy, comme sur “Plagues Of Babylon”.
Sur ce duo harmonieux porte la voix du frontman Stu Block, dont la prestation se révèlera plutôt bonne. Le rugissement introduisant “Dystopia” nous révèle son coffre, même si on déplorera son timbre beaucoup trop aigu à certains moments. Elle conviendra néanmoins à la tonalité mélancolique de certaines ballades, notamment sur l’introduction de “I Died For You” et sur la bouleversante “Watching Over Me” écrite par l’ancien chanteur Matt Barlow, que Block dédiera à ceux de nos entourages morts trop tôt.
C’est sur cette note poignante que se terminera le “MTV Headbangers Ball Tour”, qui d’année en année continue à faire carton plein de l’avis de tous les aficionados qui répondent présents à l’appel !