Mardi dernier, pendant que l’équipe de foot de Liverpool terrassait le Barça 4-0, Mumford & Sons faisait de même avec un Zénith ultra complet. Après l’accueil plutôt mitigé de son dernier album, “Delta”, la bande britannique a effectué sa propre remontada en conquérant son public français.
Quand GANG OF YOUTHS, la première partie, investit la scène, la salle est déjà bondée. Venu d’Australie, le quintette fait résonner son rock alternatif ambitieux. Certes un peu lisse, mais suffisamment ardent pour attirer l’attention. Outre la vélocité implacable du batteur Donnie Borzestowski (mention spéciale pour “What Can I Do If The Fire Goes Out?”), c’est surtout le charisme du chanteur qui interpelle.
Tignasse ondulée, carrure impressionnante, déhanché infernal, David Le’aupepe semble être le résultat improbable d’un drôle de mix entre le Dothraki Khal Drogo et Michael Hutchence, regretté leader d’INXS. Avec dans la voix, quelques accents à la Bono. Quand il ne remue pas sur scène, enchaînant pas de danse, mots dans un français, de son propre aveu, bancal, et explications de texte, le chanteur s’élance dans la fosse, gravit les escaliers de gradins à toute vitesse, et étreint des spectateurs, trop heureux de chanter avec lui.
Bref, les trucs et astuces de leader de groupe de rock, il les maîtrise. Un set généreux, desservi par un son poussé au maximum, qui a pourtant reçoit un accueil plutôt timide.
Mais, dès que l’arrivée de la tête d’affiche se profile, la salle s’embrase. Peu après 21h, MUMFORD & SONS grimpe sur scène avec un léger retard, qu’on pense pouvoir mettre sans trop de doutes sur le dos d’une envie de rester devant la retransmission du match Liverpool-Barcelone chez les footeux de la bande.
Alors que la quasi-totalité des gradins est déjà debout, le quatuor ouvre le score avec “Guiding Light”. Avec ses six musiciens additionnels, il prend des airs d’orchestre. Ou, quitte à filer la métaphore, d’équipe de foot presque complète. L’enchaînement folk, tout banjo dehors, “Little Lion Man” / “The Cave” / “Holland Road”, met debout les derniers réfractaires. Le concert vient de commencer, mais on se croit en plein rappel tant l’énergie qui lie le groupe à son public est chaleureuse.
L’efficacité des anciens morceaux n’est plus à prouver. Mais c’est son nouvel album, “Delta”, que Mumford & Sons est venu défendre. Si “Beloved” et “Picture You”, déjà fades sur le disque, ne se démarquent pas beaucoup plus en live, “Slip Away”, et surtout “Darkness Visible” prennent encore plus d’ampleur. On est loin des racines folk de la bande, mais cet univers alternatif, presque psychédélique pour le deuxième morceau, lui va terriblement bien.
Dans cette veine, “Tompkins Square Park”, “Believe” et “Ditmas”, extraits du troisième album “Wilder Mind” (2015), fonctionnent aussi très bien. Mais quand le groupe retourne à ses premières amours, ça marche encore mieux. “Lover Of The Light”, interprété par le chanteur installé à la batterie, ou encore “The Wolf”, électrisent l’assemblée. Surtout quand Marcus Mumford s’offre un bain de foule en traversant fosse et gradins.
Après un passage backstage, la formation revient sans musiciens et sans instrument, hormis la guitare acoustique du chanteur et un micro, installé sur une petite avancée de la scène. Les quatre Mumford l’entourent pour un set acoustique de trois morceaux, à mi-chemin entre le feu de camp et la cérémonie religieuse.
Alors que les musiciens additionnels les rejoignent, le frontman, excité comme un gamin, s’exclame : “Liverpool mène 3-0 !” En gros fan de foot, il continue : “On va faire un break de vingt minutes. On revient après et on joue plein de morceaux en plus, OK ?” Puis il éclate de rire, jugeant sa proposition “vraiment pas professionnelle”.
Puis il accueille Gang Of Youths, la première partie, pour jouer ensemble “Blood”, une reprise de The Middle East. Quatorze musiciens sur scène, un déferlement d’énergie, pour un des meilleurs moments du concert.
L’ultra fédérateur “I Will Wait” déclenche presque quelques pogos, puis “Delta” et un jet de confettis plus tard, la bande quitte la scène en affirmant que c’est son meilleur concert parisien en date.