A peine un mois après le passage de son frère à l’Olympia, Noel Gallagher s’offre deux dates dans la même salle. L’occasion de présenter son troisième et dernier album, “Who Built The Moon?” et de répondre à une autre question existentielle : que vaut l’ainé Gallagher sur les planches, le cap des cinquante balais passé ? Récit de cette seconde date parisienne.
Avant d’avoir une réponse, il faudra suivre le concert de BLOSSOMS. Des coupes de cheveux aux vêtements en passant par la musique, le doute n’est pas permis, les petits gars viennent de Manchester. A la croisée entre Depeche Mode et Oasis, groupes avec lesquels ils ont été biberonnés toute leur enfance, les Anglais délivrent un rock aux accents psyché et vintage flirtant parfois avec un kitsch tout sauf désagréable car décomplexé. Basse vrombissante, nappe de clavier rétro, nous voilà téléportés à minima vingt-cinq ans plus tôt ! Blossoms porte plutôt bien son nom parce qu’en dépit de s’être déjà présenté au public la veille, le groupe n’a que cinq ans de carrière et s’apprête tout juste à sortir son deuxième album ! Le milieu du set se ralentit avec la version acoustique de “I Can’t Stand It” qui marque une jolie pause. Le final dansant “Charlemagne” clôt un set d’une demi-heure qui, s’il n’a vraisemblablement pas convaincu ceux qui sont venus pour Noel Gallagher, a tout de même plus que tenu ses promesses en nous faisant découvrir un groupe digne de la mythique Madchester.
Une demi-heure plus tard, NOEL GALLAGHER’S HIGH FLYING BIRDS investit la scène et entame sans surprise son set par la très festive “Fort Knox” qui ouvre le dernier album. Une mise en scène haute en couleur et un son parfaitement équilibré rattrapent une présence un peu effacée des musiciens malgré la chanteuse française Audrey Gbaguidi qui danse. Les premiers titres sont consacrés à cette nouvelle offrande, très psychédélique et différente des débuts du groupe. Si le tout est très bien exécuté, le côté parfois dansant ne semble pas faire l’unanimité, à l’exception de la tubesque “It’s A Beautiful World” et de son refrain entêtant. Et ce soir, il y a du monde sur scène puisqu’une section de trois cuivres investit un coin de la scène sur “Riverman” et d’autres morceaux, ambiance garantie !
Mais très vite, le public s’impatiente et veut écouter du Oasis. Il faudra attendre la dixième chanson pour finalement entendre “Little By Little” repris en cœur par une foule de nostalgiques. L’intensité pourrait redescendre et s’essouffler sur le champ mais Noel en décide autrement et reste seul pour interpréter une inédite du dernier effort studio, la touchante ballade acoustique “Dead In The Water”. Exit la fougue d’Oasis, le Mancunien instaure une intimité sacrale avec son audience et nous montre l’étendue des capacités de son organe vocal sous un silence quasi religieux. Bluffant.
Et c’est cette intensité si spéciale qui manquera à un set qui ne fera que des allers retours constant entre Noel et Oasis. Le musicien prend plus de plaisir à jouer des titres de son groupe et semble gonflé de jouer du Oasis. Pour son auditoire, c’est un peu l’inverse : la curiosité l’a poussé à venir mais c’est avant tout la perspective d’entendre des vieux titres d’Oasis qui a été décisif dans sa décision de venir ce soir. “Wonderwall” en est un parfait exemple, Noel en joue une version accélérée et change l’air de certaines parties pour semble-t-il s’épargner que l’assemblée ne reprenne en cœur le tube radiophonique. L’ainé Gallagher serait-il toujours en proie à ses vieux démons ?
Autre constat et pas des moindres : l’enfant terrible du rock a égaré sa fougue dans les méandres de la décennie passée. La présence scénique de la troupe est assez molle et pauvre et semble délibérément camouflée (ou excusée) par de belles mises en scène qui alternent vidéos diverses et zoom sur les musiciens qui jouent. Mais qui vient-on regarder ce soir ? De bons musiciens dont les pieds sont vissés au sol. Si les chansons sont parfaitement exécutées, elles ne sont que des calques à l’identique des originales. Pas d’improvisation, pas de réinterprétation, le délivrable est délivré dans les règles. Ne boudons pas notre plaisir, l’enchaînement final de “The Right Stuff”, “Don’t Look Back In Anger” d’Oasis repris en cœur et “All You Need Is Love” des Beatles sauve heureusement la mise haut la main !
Ce soir, Noel Gallagher’s High Flying Birds montre qu’il est capable de livrer un show carré et ultra professionnel, le tout pendant près de deux heures et dans une ambiance assez bonne enfant. Mais la vraie question est : où placer le curseur de nos attentes ? Il semblerait qu’une partie du public l’ait naturellement (et très certainement injustement) placé sur Oasis. Or, il manquait ce soir l’autre moitié d’Oasis et les six morceaux joués n’étaient que de brèves parenthèses entre la quinzaine d’autres titres de NGHFB . Les vieux démons de Liam et Noel sont peut-être aussi ceux de leur public.
Setlist :
Fort Knox
Holy Mountain
Keep On Reaching
It’s A Beautiful World
In The Heat Of The Moment
Riverman
Ballad Of The Mighty I
If I Had A Gun…
Dream On
Little By Little
The Importance Of Being Idle
Dead In The Water
Be Careful What You Wish For
She Taught Me How To Fly
Half The World Away
Wonderwall
AKA… What A Life!
—-
The Right Stuff
Go Let It Out
Don’t Look Back In Anger
All You Need Is Love