Les 4 et 5 décembre était organisée au Trianon la soirée Pathway To Paris, regroupant plusieurs musiciens et activistes engagés sur les problématiques écologiques. L’évènement, au profit de l’association 350.org, regroupait notamment les musiciens Flea, Thom Yorke, et Patti Smith.
Pour ceux d’entre vous qui n’en auraient pas entendu parler, Pathway To Paris est une organisation regroupant des musiciens, artistes, auteurs, activistes, ou encore des municipalités souhaitant mettre en valeur des solutions au changement climatique. Lancé il y a un an et demie par les musiciennes Jesse Paris Smith et Rebecca Foon (toutes deux présentes ces deux soirs), le Pathway a organisé plusieurs événements de ce genre, en marge d’évènements officiels comme le rassemblement des Nations Unies en 2014 ou la COP20, pour finalement suivre ce “chemin vers Paris” jusqu’à la COP21.
Nous nous sommes donc rendus à cette soirée, point d’orgue de toute cette initiative. Enfin, ces deux soirées. Car devant le succès inattendu du 4 décembre, une deuxième date a été programmée le lendemain. Pour les co-fondatrices, que nous avons ou voir à la conférence de presse dans l’après-midi du 4, c’est un appel à agir maintenant, dans l’intérêt de tous. L’idée est de trouver des solutions (certaines étant déjà portées par les activistes), de manière urgente. Naomi Klein, journaliste et essayiste qui, pour l’anecdote, a énormément inspiré Thom Yorke, rappelle l’importance de se rassembler, et pas seulement pour aller faire du shopping de Noël.
Des propos très largement soutenus par Patti Smith, pour qui tout est question d’humanité. “Je me suis toujours sentie concernée par la planète”, déclare-t-elle, “en tant qu’artiste, mère, citoyenne… Je ne suis pas scientifique, mais je crois que tout le monde peut faire un petit quelque chose et s’engager d’une manière ou d’une autre”. Flea, bassiste des Red Hot Chili Peppers, est également présent, et ajoute que “l’amour doit prendre le dessus sur les besoins individuels. Je ne peux pas faire confiance aux politiciens, qui fréquentent des lobbys, et qui pensent d’abord aux intérêts financiers. C’est l’amour qui doit nous guider, pas le commerce”.
La conférence se déroule aussi sous l’oeil bienveillant de Bill McKibben, fondateur de 350.org, et en compagnie des musiciens Tenzin Choegyal et Fally Ipupa. Nous n’allons pas vous détailler chaque phrase de chaque personne, mais sachez que c’est toujours cette idée d’action et de rassemblement qui prédomine.
Tout cela nous amène donc au spectacle, quasi identique les deux soirs. Dans le Trianon, rempli, des sièges sont installés dans la fosse, mais ça n’en empêche pas certains de rester debout, sur le côté, quand ceux-ci sont pris. Chacune des soirées s’ouvre sur un discours de membres de l’UNDP (United Nations Development Program), représenté par PRADEEP KURUKULASURIYA le 4 et JO SCHUER le 5, avant de laisser place aux deux fondatrices JESSE PARIS SMITH et REBECCA FOON, venues rappeler ce qu’elles nous disaient plus tôt. Les deux jeunes femmes s’installent ensuite pour un duo piano/violoncelle et, surprise, sont rejointes par Patti Smith, le temps de lire un poème sur la Nature et ce qu’elle représente. L’artiste rejoint ensuite humblement les coulisses, laissant place, le premier soir, au maire de Vancouver, GREGOR ROBERETSON, venu expliquer l’initiative de sa ville, à savoir passer à 100% d’énergie propre d’ici 2020.
C’est ensuite au tour du chanteur et musicien tibetain TENZIN CHOEGYAL d’entrer en scène, accompagné par les deux fondatrices, et, exclusivement le deuxième soir, de Flea (à en croire l’Instagram du bassiste, les deux se sont liés d’amitié pendant leur séjour à Paris). Le formation ainsi formée nous propose deux morceaux, odes à la vie et à la paix, emmenés par la voix de Choegyal, et par son dranyen (instrument traditionnel).
Le 5, un invité supplémentaire rejoint l’événement, en la personne de TOM STEYER, président de NextGen Climate America, qui marque la foule d’un message simple mais clair qu’il nous fait scander en choeur : “I believe that we will win”. Mais l’une des stars des deux soirées est BILL MCKIBBEN, chaudement applaudi par la foule. Le fondateur de 350.org livre un discours très drôle et pourtant très réaliste, rempli de punchlines assez brillantes, et dont l’un des objectifs et de dénoncer la société Exxon, ayant poursuivi bon nombre d’actions polluantes tout en connaissant très bien les connaissances… il y a déjà vingt ans de cela : #ExxonKnew.
Retour de la musique avec le Congolais FALLY IPUPA, accompagné d’un (plutôt bon) guitariste. Un duo voix/deux guitares nous livre ainsi deux titres lumineux, positifs, et qui gagne vite les coeurs du public qui ne se fait pas prier pour frapper des mains. Quinze minutes d’entracte s’en suivent, le temps d’aller chercher une petite Ben & Jerry’s (gratuite, en plus, l’entreprise est partenaire du Pathway !).
On reprend vite avec FLEA, introduit par nulle autre que Patti Smith elle-même. Le musicien est accompagné pour l’occasion de l’illustre WARREN ELLIS, multi-instrumentiste de talent entre autres collaborateur de Nick Cave. L’improbable duo interprète alors deux titres fleuves, en instrumental. Guidés par la basse de Flea, les morceaux sont aussi accompagnés de sa trompette (chose rare), le tout soutenu par le violon et la flûte d’Ellis. Le set est d’une intensité rare, et d’une complexité technique incroyable, tant et si bien que quelques larmes coulent déjà sur les joues du public (et ce n’est que le début). A la fin, c’est une standing ovation qui remercie des artistes, alors que Flea scande ô combien il nous aime.
Autre personnalité attendue, NAOMI KLEIN nous rejoint ensuite pour un long mais très pédagogue discours non seulement sur le climat, mais aussi sur l’économie, et sur l’état d’urgence que subit la France. “”La vie doit continuer”, nous disent-ils, mais nous disons que cela ne concerne pas que les marchés de Noël et les matchs de football”. Tout est dit.
C’est ensuite au tour de PATTI SMITH de ré-investir la scène, accompagnée d’un véritable ensemble formé par Jesse Paris Smith et Rebecca Foon, Flea (encore lui), et un guitariste additionnel (son bassiste habituel de tournée). Le petit groupe live un set de cinq titres, dont les chansons les plus emblématiques de l’artiste (“Dancing Barefoot”, “Pissing In A River”…), mais aussi une reprise, bien au delà d’un quelconque cliché, du “Imagine” de John Lennon. Le morceau mènera toute la salle aux larmes, y compris la chanteuse elle même, et on assistera une fois de plus à une standing ovation bien méritée.
Dernière activiste de la soirée, VANDANA SHIVA (chercheuse, militante et auteure indienne) vient nous rappeler, en ultime discours, l’importance de faire barrière aux OGM, pour au contraire se concentrer sur une agriculture propre et intelligente, l’une des réponses majeures aux désastres écologiques. Et bien sûr, elle nous invite, comme ses confrères, à faire preuve d’unité, de compassion, et à amener la paix.
En conclusion, c’est la tête d’affiche de la soirée qui investit la scène : THOM YORKE. D’abord seul avec sa guitare, le musicien nous fait la surprise de nous présenter deux inédits, dont au moins probablement un nouveau Radiohead : “Silent Spring” et “Desert Island Disk”. Le cinq, c’est un classique de Radiohead, “Fake Plastic Trees”, qui prendra la place du deuxième, à la (bonne) surprise générale. Yorke s’installe ensuite au piano pour la sublime “Bloom”, avant d’enchaîner à la guitare sur “The Present Tense” (extrêmement attendue), puis sur “The Clock”. En point d’orgue, c’est Flea qui, une fois de plus, rejoint la scène, pour une réunion (en partie) d’Atoms For Peace, avec les titres “Default” et “Atoms For Peace”. Le duo, avec ces deux morceaux, fait ainsi danser la salle comme si les sièges n’étaient plus là.
La soirée s’achève finalement par un dernier morceau réunissant tous les acteurs de la soirée pour un ultime message, en toute logique : “People Have The Power”.