Premier concert du groupe d’Akron sur les deux prévus coup sur coup au Zénith de Paris, The Black Keys n’a pas lésiné sur le rock n’roll et les invités prestigieux pour faire de cette soirée une nuit mémorable.
À peine 19h et le début du set de SHANNON AND THE CLAMS, la salle est encore clairsemée. Certains ont préféré rentrer rapidement dans le Zénith pour se mettre à l’abri de l’orage aussi soudain que violent, tandis que d’autres sont restés près des stands de merch pour siroter leur pinte de bière à l’abri. Résultat ? Un public assez dispersé pour le groupe Shannon And The Clams et son rock qui mélange allègrement doo-wop, blues et garage rock.
Avec son look inspiré des années 60, Shannon Shaw (qui donne son nom au groupe) et le reste de la bande ouvrent la soirée avec leur rock très référencé. Alternant entre des titres chantés par Shannon puis par Cody Blanchard, le groupe originaire d’Oakland propose un set d’une trentaine de minutes sympathique. Sans être révolutionnaire, le style de Shannon And The Clams s’inscrit dans la droite lignée de l’affiche que l’on imaginait pour ce soir : du blues rock des années 60.
Sans être très bavards, les Américains font le job et le font bien. Pas de grands débordements de joie ou de cris extatiques dans la salle, tant les spectateurs semblent être plus occupés à faire des allers-retours entre le bar et leur place pour pouvoir s’hydrater. Merci au Zénith pour la climatisation presque inexistante.
Spoon
Changement d’ambiance pour le set de SPOON : les fans sont présents et entendent bien le montrer au groupe texan. La musique est également différente : pas de blues rock ou de doo-wop, mais un rock plus psychédélique et puissant, le tout bercé par la voix proche de celle des frères Gallagher de Britt Daniel. On découvre aussi quelques notes de new wave, bien cachées au milieu du déluge de guitares.
Spoon a près de vingt-cinq ans de carrière et n’a plus grand-chose à prouver, ce qui rend le set particulièrement électrique : le guitariste semble possédé, tout comme Britt Daniel. Les deux derniers titres du set de quarante minutes font décoller la salle, qui ne semblait attendre que cela.
La configuration du Zénith ne semble pas très adaptée à l’énergie du groupe, et nous guetterons dans les mois à venir si Spoon nous fera le plaisir de revenir dans une salle plus appropriée.
The Black Keys
Au fur et à mesure que les minutes s’écoulent avant le set des Américains, l’ambiance se tend et devient de plus en plus électrique. La tension est palpable, et les premiers rangs se pressent un peu plus près de la scène.
21h10 : l’entrée du duo d’Akron et de ses musiciens se fait sous les hurlements des spectateurs. Les hostilités démarrent avec “I Got Mine”, une perle bluesy à souhait, “réorchestrée” ici comme un tube de rock n’roll lascif.
On ne peut que constater que Dan Auerbach a une voix de velours et un jeu de guitare incroyable. Notons aussi le martèlement régulier des tambours par Patrick Carney, malgré quelques petites fautes de tempo à certains moments. Le son est fort et écrasant, aucun répit ne nous est laissé par THE BLACK KEYS.
La scénographie se révèle vraiment dès le deuxième titre : un écran de chaque côté de la scène et un immense écran rectangulaire en tant que fond, sur lequel seront projetées pêle-mêle des photos du groupe, des incrustations psychédéliques, etc. La lumière est conçue pour mettre en avant le duo plus que les musiciens “additionnels“, cantonnés à une petite scène surélevée derrière.
Il faut attendre le quatrième titre, “Gold On The Ceiling” (extrait de El Camino (2011), probablement le meilleur album du duo d’Akron), pour que le concert passe dans une autre dimension : il n’y aura plus de temps mort dans le public, que ce soit dans la fosse ou les gradins. Tout le monde est debout, danse, hurle, saute. La formation semble sentir cette bonne humeur et cette ferveur et ne manque pas de le souligner. Peu loquace, Dan Auerbach fera néanmoins l’effort de s’adresser à l’assemblée à plusieurs reprises.
L’invité surprise
Les seuls moments où l’ambiance semble s’apaiser sont lors des morceaux plus récents du groupe. Avec le virage moins brut pris par The Black Keys sur Dropout Boogie (2022), l’atmosphère de la salle se calme. “Your Team Is Looking Good” et “It Ain’t Over” soulèvent moins la foule que “Everlasting Light”, “Fever” ou “Next Girl”. Qu’importe, la bande se donne à fond et Dan Auerbach nous fait une véritable démonstration de guitar hero tout au long du set.
L’enchaînement “Lo/Hi” et “Howlin’ For You” donne lieu à l’une des fins de concert les plus intenses : sur chacun des titres, les spectateurs sont debout et chantent, sans aucun répit ni volonté de s’asseoir. Et que dire de “Little Black Submarines” qui a l’effet d’un tsunami sur le Zénith ?
Mais la fin du set est proche, et derrière les lunettes fumées d’Auerbach, on devine la malice. Que nous réserve-t-il ? Rien de moins que Beck en invité spécial !
Il empoignera le micro pour un “Loser” d’anthologie et un “Lonely Boy” qui achèvera de nous mettre à genoux.
The Black Keys sont définitivement les rois du blues rock américain.