
Pour la première date européenne de sa tournée Oh! The Tour célébrant l’album Oh! The Ocean paru en début d’année, The Wombats s’est offert un Trabendo comble et surexcité. Entre vieux classiques et nouvelles pépites, le groupe a su rendre honneur à ses succès incontournables tout en honorant l’évolution stylistique de sa synthpop fédératrice.
Red Rum Club
Décidément, The Wombats sait s’entourer. Si la pépite Everything Everything a assuré certaines premières parties sur la section britannique de la tournée, les shows restants ont eu droit à la pop rock pleine de caractère de RED RUM CLUB, venu gratifier le Trabendo de son fun et de son charisme irrésistibles. Les six musiciens ont enchaîné trente minutes de refrains accrocheurs (“Black Cat”, “Vanilla”) et d’arrangements dynamiques, en évitant les écueils d’un set trop sucré au point d’en devenir écœurant.
Percées épiques à la trompette et voix de crooner subliment le tout de leur originalité. Avec son chant tantôt Alex Turner, tantôt Robbie Williams, et sa présence scénique comparable au leader des Arctic Monkeys, Fran Doran retient l’attention sans le moindre mal. Pour son tout premier passage à Paris, Red Rum Club a fait danser et chanter l’auditoire (notamment en l’honneur de l’anniversaire du trompettiste, Joe “the blow” Corby), et a plaqué sur les centaines de visages agglutinés des sourires enthousiastes confirmant l’attrait pour l’ambiance légère et ensoleillée proposée. Les Anglais quittent la scène sous une ovation amplement méritée.
“Everything is going wrong but we’re so happy”
Après trente minutes d’attente passées à se dandiner sur l’excellente playlist proposée par le Trabendo (de “Dancer” d’Idles à “Good Luck, Babe!” de Chappell Roan en passant par “365” de Charli xcx et “Tick Tick Boom” de The Hives, pour ne citer que quelques exemples), le public du Trabendo est plus que prêt à recevoir de plein fouet le groove pop rock unique de THE WOMBATS. Ceux-ci débarquent sur scène et en deux chansons, livrent un bon aperçu de l’étendue de leur palette musicale : à la doucereuse “Sorry I’m Late, I Didn’t Want To Come” issue du dernier album, succède l’électrique “Moving To New York”, première d’une longue liste de fan favorites présente sur la setlist.
C’est surtout à partir de “Techno Fan” que la fosse accentue ses mouvements et s’autorise quelques sauts sur les “ohohoho” on ne peut plus emballants du refrain. La facette la plus rock de la formation s’incarne surtout dans les morceaux de Proudly Present… A Guide To Love, Loss & Desperation (2007) et Fix Yourself, Not The World (2022), desquels le trio a pioché ses plus gros tubes : “Kill The Director” et “Let’s Dance To Joy Division” accompagnent “Moving To New York” pour le premier, tandis que “Ready For The High”, “Method To The Madness” et “If You Ever Leave, I’m Coming With You” sont jouées pour le deuxième. Chauffée par la progression explosive de “Method To The Madness”, c’est sur “If You Ever Leave, I’m Coming With You”, placée en avant-dernière position du set principal, que la soirée prend un autre tournant : exit les bondissements sporadiques de l’auditoire, place à un véritable moshpit qui explosera complètement sur l’irrésistible “Let’s Dance To Joy Division” et accompagnera même la sélection un poil moins dynamique constituant le rappel (“Can’t Say No”, “Turn” et “Greek Tragedy”).
A de nombreuses reprises, le public prouve qu’à ses capacités d’excitation corporelle se conjugue une bonne maîtrise des sections de chant les plus emblématiques de la discographie des Anglais : les refrains de “Moving To New York”, “1996”, “Tokyo (Vampires & Wolves)”, “Turn”, sont chantés à tue-tête, et le premier rôle est laissé à l’audience sur les “This is no Bridget Jones” du pont de “Kill The Director” tandis que musiciens et fans s’offrent l’a cappella de “Tales Of Girls, Boys And Marsupials” dans un unisson superbe.
Dans un registre propre à l’univers paradoxal des Wombats, cette énergie débordante se marie à la perfection avec la sorte de nonchalance bon enfant qui émane de la prestation de Matthew Murphy, Daniel Haggis et Tord Øverland-Knudsen. Le premier livre des anecdotes sur certaines chansons, rit de ses erreurs techniques et dédie “Lethal Combination”, réduite à une version acoustique, à Paris en l’honneur des nombreuses bonnes soirées passées dans la capitale. Pour le reste, les paroles amusantes et cyniques de ses compositions se chargent de retranscrire l’étonnant mélange de sérieux et de fun que chacun connaît aux Britanniques. Derrière sa batterie, Haggis n’en est pas moins le plus bavard du concert et multiplie les interactions – en Français ! – avec l’auditoire. Une mascotte à l’effigie d’un wombat rejoint les musiciens sur “Ready For The High”, et ce sont quatre d’entre elles qui font irruption sur scène pendant “Let’s Dance To Joy Division”, accentuant l’aspect loufoque et attachant de la marque Wombats.
Finalement, ce sont bien les paroles de cette dernière qui résument au mieux la soirée : “Everything is going wrong but we’re so happy“, s’exclame l’ensemble de la salle. De quoi conclure en beauté l’esprit The Wombats : une expression satirique des malheurs du monde déguisée en hymnes festifs et redoutablement joyeux.