Fort d’un concert très remarqué à l’Espace B en novembre dernier, les Espagnols de Toundra n’ont pas souhaité attendre plus de six mois pour sillonner à nouveau l’Europe. C’est au Gibus Live, dans une salle beaucoup plus grande, que la formation post rock fait son retour.
A 20h, ce sont les Parisiens de BIEN A TOI qui ont la lourde tâche d’entamer la soirée. Dernière date de leur petite tournée française, le combo est là pour présenter “Alta Loma”, son premier album sorti en juin dernier. Le son, anormalement fort et ultra saturé, oblige le port de boules quies. Si le groupe joue lourd, il sait alterner l’ensemble avec des phases plus aériennes. Pratiquant une sorte de post rock minimaliste et hypnotique, à la frontière du post metal, la poudre ne prend pas vraiment, l’émotion n’est jamais loin mais les riffs de Bien A Toi ne sont qu’une succession d’ambiance, mis bout à bout, sans réelle histoire ou lien apparent. La présence sur scène de la formation reste à souligner mais il faut bien avouer qu’à la fin des trente minutes de set, seul l’ennui aura su prendre place.
Changement de décor et bref retour dans les années 90 avec VALLEY et son indie punk/emo qui n’a pas réellement sa place sur l’affiche. Le son se doit encore une fois d’être corrigé par le port de boules quies, qui permet de rendre audible les mélodies développées par le quatuor. Seul groupe ayant des parties vocales ce soir, Valley casse un peu les oreilles de l’auditoire avec un chant emo écorché qui gâche le potentiel instrumental de ses compositions, mélange curieux oscillant entre punk rock et math rock. Les Parisiens piochent dans leurs précédents EP ainsi que dans leur dernière production, un split sorti avec Slice Of Life. Les quelques accalmies ou passages aériens sont bien sentis et auraient mérité d’être plus appuyés ce soir. Pas étonnant de voir que l’un des guitaristes, Philippe Khalilian, a officié dans Lost In Kiev (post rock). Le jeu de guitare de ce dernier sauve la performance de Valley, dont le style optimiste mais pas assez rêveur et aérien ne sied pas du tout à l’affiche de la soirée. A revoir avec un autre plateau et avec un meilleur son.
Qui a dit que les Espagnols étaient toujours en retard ? C’est à 20h55 que TOUNDRA débarque sur scène pour la clôture de cette tournée de dix-huit dates sur le Vieux Continent. Le son du Gibus Live aura été constant du début à la fin de cette soirée : inécoutable sans protections auditives. Heureusement, une fois équipé, les mélodies du combo ressortent bien et la lourdeur des accords n’est pas altérée. Le combo pioche équitablement dans ses albums avec trois titres issus de “II”, “III” et le dernier “IV”, sorti en janvier 2015. Les plus grands classiques y passent : des ambiances orientales de “Magreb” en passant par des ambiances plus posées comme avec les arpèges cristallins de “Kitsune”, sur le dernier opus. Les lumières à dominance rouge bercent l’ensemble du show, où un logo Toundra succède par moment avec la belle pochette de “IV”.
En plus d’une présence scénique incroyable – et en dépit d’une musique très contemplative – les Espagnols savent faire preuve d’humour comme le guitariste de droite qui, dans la joie et la bonne humeur, fait des bisous à ses camarades de jeu. C’est une réelle complicité qui rallie les quatre membres de Toundra. L’audience, majoritairement franco-espagnole (chaque chanson est ponctuée de quelques mots en espagnol venant de l’assemblée), est complètement absorbée par ces ambiances qui, plus que sur CD, prennent le temps de s’étirer et de dévoiler tout leur charme. Toundra donne réellement une deuxième vie à ses compositions, sans pour autant en changer la recette, somme toute classique : arpèges de qualité entrant en collision avec de solides murs de sons, qu’ils soient syncopés ou non. Cette dynamique, qui respecte à merveille chaque ambiance, instaure une symbiose parfaite entre la musique et le quatuor, qui incarne réellement ses morceaux. Les vieux titres comme “Bizancio” sont un régal pour les tympans et les corps ne peuvent se refuser à entrer en transe. Après un court rappel, le quatuor revient avec “Oro Rojo” puis sur la très enthousiaste et démentielle “Belenos”.
L’expérience Toundra : 1h10 de concert qui fut comme une seule et même piste pour un public qui n’a pas décroché un instant, constamment suspendu aux ondes délivrées par des musiciens au talent et à la fougue indéniables. Le rendez-vous est pris pour dans six mois !
Setlist :
Strelka
Marte (Mars)
Magreb
Kitsune
Requiem
Cielo Negro (Black Sky)
Bizancio
—-
Oro Rojo
Belenos