Dire qu’un concert français de Weezer est un événement rare à ne louper sous aucun prétexte est plus qu’un euphémisme. Et pour cause, la dernière fois que les Américains étaient venus dans la capitale remonte à juin 2005, dans le cadre du “Make Believe Tour”, tournée organisée à l’époque suite à la sortie du cinquième album studio “Make Believe” (2005). A cette occasion, le quatuor investissait la belle salle de l’Olympia, enceinte qui reçoit, douze ans plus tard, de nouveau ce même groupe, cette fois-ce dans le cadre du “Feels Like Summer Tour”. Une tournée qui tire également son nom du futur onzième album studio, prévu pour le 27 octobre prochain. Vu la rareté de sa venue, rien d’étonnant donc à voir afficher “complet” à côté de la bande de Rivers Cuomo, des semaines avant son arrivée officielle, signe d’un engagement fort des fans de la formation.
A 20h pile, les lumières s’éteignent afin de laisser place à l’unique première partie du soir. Face à un Olympia bondé de part et d’autre, le quintette THE ORWELLS ouvre le bal à coups de mélodies indie rock et punk, dirigées de façon originale par le très excentrique Mario Cuomo (aucun lien de parenté avec le frontman de Weezer), aux bottines rosées et à l’ensemble noir ample. Avec son attitude sujette au dandinement, son expressivité physique évidente et son distinctif micro à fil blanc, celui-ci délivre un chant haut perché mais largement maîtrisé, qui se marie drôlement bien avec le son rentre-dedans et plus brut du reste de l’ensemble, notamment sur “In My Bed” ou “Fry”, issu du dernier disque en date “Terrible Human Being” (2017). On retiendra surtout la longue outro de “Double Feature” réalisée sans le frontman, à la progression enivrante et au bouquet final jouissif sur les bords. Si la réputation d’être une troupe assez réactive précède The Orwells depuis quelques temps, ce dernier se montrera assez docile et sous contrôle à l’Olympia. Et c’est tant mieux pour tout le monde !
Horaires respectées à la seconde près, c’est une heure plus tard que le clou du spectacle débute, comme si de rien n’était. Si la question du “comment vont faire les Américains pour rattraper le temps perdu en si peu de temps ?” demeure, notre interrogation passe rapidement à la trappe dès les premières notes de guitare. Sans artifice et sur une scène épurée au maximum, Rivers Cuomo (chant/guitare), Brian Bell (guitare) et Scott Shriner (basse) et Patrick Wilson (batterie) saluent sans prétention le public, et démarrent à la surprise générale “El Scorcho”, extrait du mythique “Pinkerton” (1996). Un cadeau de taille qui le sera d’autant plus lorsque s’illuminera pour la première fois et en rythme le fameux “W” de WEEZER, éclairant par dessus tous les premiers mouvements de foule, entre excitation, libération et soulagement. Sur l’estrade, le quatuor se veut relativement neutre et statique, surtout Cuomo, concentré sur son jeu et son chant qui, il faut le dire, n’a pas vieilli depuis plus de vingt ans, continuant de raisonner à la quasi-perfection. Un jeu de scène sobre, parfois même rustique, voire drôle, comme lors de “Perfect Situation” où Bell et Shriner se réunissent au niveau de Wilson afin de laisser les lumières et l’attention à Cuomo, le temps d’un couplet.
Au programme de la soirée, plus de vieux que de jeune, pour le plaisir des puristes. Si Weezer prend le temps de présenter “Pacific Daydream” via “Weekend Woman”, étonnamment plus rock en live, ou encore “Feels Like Summer”, en plus de quelques titres du “White Album” (2016), (“California Kids” aux choeurs fédérateurs, “Thank God For Girls”), le set des rockeurs est principalement composé de tubes de la partie plus ancienne de leur discographie : des lights épileptiques de “(If You’re Wondering If I Want You To) I Want You To” à la claque musicale de “Surf Wax America”, de l’immanquable “Pork And Beans” au décontracté “My Name Is Jonas”, le concert a plus une allure de résumé sélectif de leur carrière que de présentation des derniers disques des Californiens. On note par exemple l’oubli de “Hurley” (2010) ou même de “Everything Will Be Alright In The End” (2014), au profit de classiques comme “The Good Life”, “Undone – The Sweater Song” ou même une reprise d’OutKast “Hey Ya !”, ouvrant les yeux sur un attachement plus probant à leur début qu’à leur passé proche. Quoi qu’il en soit, la performance de Weezer, aussi simpliste soit-elle, est surtout un parfait échantillon de ce qui a fait sa renommée : un ensemble de morceaux unificateurs et radieux, repris en choeur par la foule, sans fioriture ni folie, à l’instar de l’interprétation explosive et clinquante de “Say It Ain’t So”.
On en aurait voulu beaucoup plus et pourtant, Weezer nous en a déjà pas mal donné avec son set assez unanime, riche et transpirant le soleil. Avec ce show largement réussi et au vu de la productivité du groupe ces dernières années, on espère surtout ne pas avoir à attendre de nouveau des centaines de mois avant de revoir le quatuor de Los Angeles dans nos contrées françaises.
Setlist :
El Scorcho
Surf Wax America
The Good Life
California Kids
Perfect Situation
(If You’re Wondering If I Want You To) I Want You To
Pork And Beans
Weekend Woman
My Name Is Jonas
Thank God For Girls
Happy Hour
A Ballad For The Fallen Soldier
Hey Ya!
Undone – The Sweater Song
Buddy Holly
Hash Pipe
Beverly Hills
Feels Like Summer
I Took A Pill In Ibiza
Island In The Sun
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Say It Ain’t So